Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 14.djvu/257

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ses dettes passai cinquante millions sterling. On se proposoit d’en réduire les intérêts de six à cinq pour cent, et cette contravention aux obligations passées sous l’autorité des actes du parlement, n’étoit pas une entreprise sans danger. On murmuroit déjà beaucoup de la prorogation en pleine paix de quatorze schellings pour livre sur le revenu des terres, établie seulement pour le temps de la guerre. Le mécontentement étoit général. Ainsi il importoit fort au roi d’Angleterre de persuader aux Anglois qu’ils étoient effectivement en guerre avec la Suède, et qu’il lui falloit de nouveaux secours pour se garantir des entreprises. On publioit donc que la flotte Anglaise seroit de trente-six à trente-huit vaisseaux de guerre, et que les Hollandois y en joindroient douze. Les ministres d’Angleterre attendoient avec beaucoup d’inquiétude le parti que prendroit le roi de Suède sur l’arrêt de son envoyé à Londres, qui avoit depuis été conduit à Plymouth. Ils prièrent Monteléon de demander de la part du roi d’Angleterre au roi d’Espagne de ne pas permettre aux Suédois de vendre dans ses ports leurs prises Anglaises, et firent en France la même demande. On n’eut pas de peine à y répondre, les ordonnances de marine ne permettant pas à un armateur de nation amie de demeurer plus de vingt-quatre heures dans nos ports. La même loi n’étant pas établie en Espagne, il y falloit une réponse décisive. Mais on n’y jugea pas à propos d’accorder cotte demande.

Albéroni désiroit toujours un traité avec l’Angleterre et la Hollande, mais il y paraissoit fort ralenti. Il croyoit avoir reconnu que trop d’empressement de sa part éloigneroit l’effet de ses désirs, et qu’il falloit moins en solliciter ces deux nations que s’en faire rechercher, et seulement se proposer d’empêcher une nouvelle union des Hollandois avec l’empereur. Il y étoit confirmé par Beretti, qui le rassuroit à l’égard de l’union qu’il craignoit par les nouveaux sujets de brouilleries que les affaires des Pays-Bas et l’exécution du traité de la Barrière élevoient sans cesse entre l’empereur