Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 14.djvu/50

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de la pairie comme il étoit arrivé au maréchal de Tallard. Nous prîmes donc un jour chez la maréchale de Chamilly, où le duc et la duchesse de Villars se trouvèrent avec Mme de Saint-Simon et moi. Là se fit l’explication et la convention nette et précise. Villars convint que tout ce qu’il désiroit étoit d’être fait duc et pair par de nouvelles lettres enregistrées au parlement de Paris, tant pour couper racine à toute prétention d’ancienneté, que parce que le parlement de Paris ne connoît point d’enregistrement d’érections de ces dignités des autres parlements, mais seulement les siennes. Qu’à ce titre, il prendroit la queue de tous les pairs au parlement, et de plus celle de tous les ducs en toutes cérémonies et actes, spécialement en l’ordre du Saint-Esprit, le cas lui arrivant, et ne prendroit ni ne prétendroit jamais en aucun acte, cérémonie, occasion quelconque, autre rang parmi les ducs que celui de la date du rang nouveau desdites nouvelles lettres, et de sa réception au parlement de Paris. Cela fut bien et clairement énoncé par moi, répété par la maréchale de Chamilly, prononcé de même par Villars, distinctement et correctement approuvé et consenti par lui, qui m’en donna sa foi et sa parole d’honneur positive et me la réitéra, de manière que j’eus honte de lui faire l’affront de la lui demander par écrit. Et voilà la sottise des honnêtes gens droits et vrais avec ceux qui ne sont rien moins, et desquels ils ne peuvent se figurer une infamie solennelle. J’ai en depuis tout loisir de m’en repentir.

Ce qui m’empêcha de parler d’écrit fut qu’il me pria d’expliquer à M. le duc d’Orléans ces conditions ; qu’il me donna sa parole que lui et son père les stipuleroient eux-mêmes en ma présence à ce prince, et qu’ils consentoient que la foi et la parole qu’ils me donnoient de s’y tenir devinssent publiques. Un homme d’honneur est aisément trompé par qui n’en a point, et qui s’en joue. Ces paroles reçues, je ne pensai plus qu’à m’acquitter de l’engagement qu’elles m’avoient fait prendre. Je représentai au régent la convenance de