Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 14.djvu/77

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en juillet. Il avoit laissé le prince de Galles régent sous le titre de gardien du royaume, et ce prince, changeant de matières à l’égard de la nation, cherchoit à lui plaire, mais sans cacher son désir de se venger de Cadogan, et de Bothmar, ministre unique pour Hanovre, à qui il attribuoit les mauvais traitements que le duc d’Argyle, son favori, avoit reçus de roi son père. Le prince traitoit Monteléon avec distinction et familiarité ; et cela persuadoit cet ambassadeur qu’il étoit toujours sur le même pied en Angleterre, quoiqu’il ne reçût que rudesses, et pis encore de Methwin [1], qui tenoit la place de Stanhope pendant son absence à la suite du roi d’Angleterre à Hanovre. Ainsi Monteléon, avec tout son esprit et ses lumières, étoit la dupe de Stanhope qui le craignoit, et le jouet d’Albéroni qui ne l’aimoit point.

Châteauneuf, que nous avons vu ambassadeur en Portugal, à Constantinople, et sans caractère chargé d’affaires en Espagne, et avec réputation, étoit devenu conseiller d’État, et étoit lors ambassadeur à la Haye. Il avoit eu plusieurs conférences inutiles sur le traité avec Walpole, envoyé d’Angleterre, qui agissoit de concert avec le pensionnaire, et Duywenworde disoit qu’il n’auroit pouvoir de conclure et de signer que lorsque le Prétendant auroit passé les Alpes. Stanhope et Bernstorff, passant à la Haye pour aller à Hanovre, avoit dit que la France avoit plus besoin de l’alliance proposée que l’Angleterre ; et ils avoient assuré les ministres de l’empereur qu’ils ne se relâcheroient point de leurs demandes, et ne feroient rien de contraire aux intérêts de l’empereur. Ils avoient les uns et les autres des conférences avec les députés des États généraux aux affaires secrètes, et les pressoient d’entrer dans l’alliance signée entre ces deux puissances ; mais la république, qui en craignoit un engagement et un renouvellement de guerre, éludoit toujours. L’

  1. Il s’agit probablement de Paul Methuen qui avait négocié, en 1703, entre l’Angleterre et le Portugal le traité qui a donné à l’Angleterre une si grande influence dans le Portugal et les colonies portugaises.