Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/87

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qu’il s’attendoit de recevoir de leur part sur l’entreprise de l’Espagne ne seroient qu’accordées à la bienséance et aux clameurs des Impériaux. Cet ambassadeur d’Espagne n’oublioit rien pour donner à sa cour de la confiance aux dispositions des Hollandois pour elle, et tout ce qu’il pouvoit de défiance de celles de la cour d’Angleterre pour détourner la négociation d’être portée à Londres, où il craignoit qu’elle tombât entre les mains de Monteléon, et pour la faire ouvrir au contraire à la Haye, dans l’espérance qu’elle n’y sortiroit pas des siennes. Il conseilloit aussi de faire quelque réponse aux propositions que l’Angleterre lui avoit faites, pour éviter le reproche de ne vouloir point de paix avec l’empereur, dont il étoit persuadé que les prétentions paroîtroient si déraisonnables, qu’il seroit très facile de faire tomber sur lui ce même reproche.

Le silence de Madrid étoit mal interprété à Paris, à la Haye, à Londres. L’envoyé d’Angleterre à la Haye s’en plaignit à Beretti et Duywenworde aussi. Il pressoit donc Albéroni de lui prescrire quelque réponse à Stanhope, non plus en espérance de négocier, mais pour faire cesser le démérite du refus de s’expliquer. Il ne comptoit nullement sur le succès de la négociation ; il représentoit, au contraire, que l’objet principal de tout l’ouvrage étoit de travailler pour les intérêts du régent, de l’Angleterre et de l’empereur, sous le nom du roi d’Espagne et sous prétexte d’agir en sa faveur. Il étoit aussi très embarrassé des questions sur la véritable destination de l’escadre espagnole, dont il ne savoit rien.

Monteléon n’étoit pas à Londres dans une moindre presse, ni dans une moindre ignorance là-dessus. Il apprit par les ministres d’Angleterre que le régent avoit dit à Stairs et à Koenigseck que l’entreprise regardoit Naples, et que, la France étant garante de la neutralité d’Italie, Son Altesse Royale avoit dépêché à Madrid, pour savoir les intentions de Sa Majesté Catholique. Wolckra, envoyé de l’empereur à Londres, et Hoffmann, qui y étoit depuis longtemps de sa part en qualité de résident, demandèrent tous deux l’assistance