Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 17.djvu/147

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Maréchal, premier chirurgien du roi, dont le fils avoit la survivance, mais si dégoûté du métier, qu’il ne vouloit plus l’exercer, s’accommoda de sa charge avec La Peyronie, fort grand chirurgien, qui parut depuis grand et habile courtisan, et qui fit grand bruit à la cour et dans le monde. Il avoit beaucoup d’esprit et d’ambition. Stairs fit une superbe entrée. Soit ignorance que les ambassadeurs n’entrent à Paris dans la cour du roi qu’à deux chevaux, ou entreprise, ses carrosses, attelés de huit chevaux, prétendirent entrer. La contestation fut vive, mais enfin il fallut entrer à deux chevaux, et dételer les six autres. Les jours suivants il alla voir les princes du sang suivant l’usage. M. le prince de Conti lui rendit sa visite ; mais ne voyant pas Stairs au bas de son escalier, pour le recevoir, comme c’est la règle, il attendit un peu dans son carrosse, puis le fit tourner, et alla au Palais-Royal se plaindre de cette innovation. Stairs avoit déjà envoyé demander une audience à Mmes les princesses de Conti, à qui M. le duc d’Orléans manda de ne le point recevoir qu’il n’eût reçu les princes du sang comme il devoit. M. le Duc suspendit aussi la visite qu’il devoit lui rendre. Stairs prétendit que la réception au bas du degré n’étoit pas dans son protocole. Il s’en fit approuver par les autres ambassadeurs, et blâmer par eux d’en avoir trop fait pour M. le duc de Chartres, qui, quoique premier prince du sang, ne devoit pas être traité différemment des autres princes du sang. Enfin au bout de deux mois de lutte et de négociations, M. le Duc et M. le prince de Conti rendirent séparément leur visite à Stairs, qui les reçut au bas de son degré. L’audace de cet ambassadeur d’Angleterre, qu’il portoit également peinte dans sa personne, dans ses discours et dans ses actions, avoit révolté toute la France. On a vu en son lieu que le régent, d’abord par Canillac et par le duc de Noailles, puis par l’abbé Dubois, dès qu’il fut à portée d’agir par lui-même, en fut subjugué, et Stairs se crut assez le maître du