Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 17.djvu/157

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bation. Tant de bruit, et la réflexion tardive sur sa matière, fit assez repentir le régent pour être tenté de révoquer la permission ; mais le marché étoit signé et l’argent compté ; il ne se trouvoit d’autre moyen que l’autorité, par un changement subit de volonté qui ne pouvoit se couvrir de surprise. Ceux qui avoient obtenu cette permission du régent lui firent honte de reculer, et Belle-Ile demeura paisible gouverneur d’Huningue ; mais il en resta une dent contre lui à M. le duc d’Orléans, qu’il lui a toujours, mais assez inutilement gardée.



CHAPITRE VIII.


Inquiétude des maréchaux de Villeroy, Villars et Huxelles-Villars, dans la frayeur, me prie de parler à M. le duc d’Orléans. — Je le fais, et le veux rassurer. — Manége et secret sur les prisonniers. — Politique de l’abbé Dubois sur l’affaire du duc et de la duchesse du Maine et des leurs. — La même politique fausse et très dangereuse pour M. le duc d’Orléans. — Je le lui représente très fortement, ainsi que l’énorme conduite à son égard du duc du Maine et de ses principaux croupiers, et le danger d’une continuelle impunité. — Je ne trouve que défaites et misères. — Trois crimes du duc du Maine à punir à la fois : premièrement, attentat d’usurper l’habilité de succéder à la couronne ; secondement, les moyens pris pour soutenir cette usurpation ; troisièmement, sa conspiration avec l’Espagne. — Conduite à tenir à l’égard du duc et de la duchesse du Maine, de leurs principaux complices et des enfants du duc du Maine. — Mollesse, faiblesse, ensorcellement du régent par Dubois. — Je cesse de parler au régent du duc du Maine, qui peu à peu est rétabli. — Adroit manége de Le Blanc et de Belle-Ile. — Duc de Richelieu et Saillant à la Bastille. — Leur folie. — Traité du premier. — Ils sont bientôt élargis. — Singularité de la promotion de l’ordre, dont je fus moins de dix ans après.

Ce qui tenoit de si court les trois maréchaux dont on vient de parler, étoit ce qu’ils sentoient en leur âme et conscience