Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 17.djvu/246

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chez Louville et une dernière chez moi. Réciproquement ils approuvèrent leurs vues et leurs moyens de les remplir. Réciproquement aussi ils trouvèrent des embarras et des obstacles. Deux hommes d’honneur et d’esprit qui sincèrement ne cherchent que le bien et ne se proposent aucun but particulier conviennent aisément, même sur ce qui reste en dispute entre eux ; ainsi, tout bien examiné, ils jugèrent tous deux que ce plan devoit être proposé et lu en leur présence, pour qu’il jugeât lui-même des points qui demeuroient indécis entre eux. Louville n’avoit pas laissé de travailler aussi à la refonte des points convenus, sur plusieurs desquels Renaud et d’Allemans s’étoient conciliés ; il entendoit bien la matière, et nous crûmes qu’il ne seroit pas inutile.

Je parlai donc à M. le duc d’Orléans de ce mémoire et je lui proposai d’en entendre la lecture en présence de ces trois hommes pour en raisonner en même temps avec eux. Il me parut que la proposition lui plut, il l’accepta avec plaisir, il voulut aussi que j’y assistasse, et me donna jour au 2 août, trois ou quatre jours après ; nous allâmes donc ce jour-là de bonne heure l’après-dînée chez lui. Lecture ou conférence durèrent quatre bonnes heures sans dispute et chacun ne cherchant que les meilleurs moyens à lever les embarras et les difficultés. La conclusion fut louanges et remercîments du régent et approbation du mémoire ; mais il fut convenu de voir pendant un an les difficultés et les succès de Renaud dans la généralité de la Rochelle, et de Silly dans une des élections [1] de Normandie, où ils travailloient à établir la taille proportionnelle, pour ensuite revoir avec eux ce même mémoire, et sur l’expérience de leur travail et les lumières que donnoit le mémoire, se déterminer, se fixer et travailler

  1. Les élections étaient des circonscriptions territoriales de l’ancienne monarchie, soumises, pour la juridiction financière, au tribunal des magistrats appelés élus. Ceux-ci connaissaient en première instance de l’assiette des tailles et des aides, ou impôts prélevés sur les personnes, les propriétés et les denrées.