Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 17.djvu/250

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

avoir jamais monté plus haut, et ne laissa pas tout doucement de continuer son commerce et d’accumuler. Il eut trois fils de la sœur de Colbert, dont l’aîné fut Desmarets dont il a été suffisamment parlé en plusieurs endroits ici pour n’avoir rien de plus à en dire, et qui, à la mort du roi, étoit ministre d’État et contrôleur général des finances, lequel, d’une fille de Bechameil, surintendant de Monsieur, a eu Maillebois, qui a donné lieu à ce récit.

Le même, mot pour mot, m’a été fait dans l’abbaye d’Orcamp par le prieur et par ses principaux religieux, et m’a été confirmé unanimement par tout le pays. Ce qu’ils ne m’ont pas dit, et ce que j’ai appris de tout leur voisinage, mérite de n’être pas oublié, pour la beauté et encore plus pour l’extrême rareté de l’action. Il y avoit trente ans, lorsque je l’appris, que le prieur et les principaux religieux de l’abbaye d’Orcamp surent que deux enfants gentilshommes, dont les ascendants paternels avoient fait de grands biens à leur abbaye et l’avoient presque fondée, étoient tombés dans la nécessité. Ils les prirent chez eux, les élevèrent, et leur firent apprendre tout ce qui convenoit à leur état ; ensuite ils trouvèrent moyen de les faire officiers, leur achetèrent après des compagnies, et tous les hivers défrayoient leurs équipages chez eux ; enfin au printemps leur faisoient une bourse pour leur campagne, et ont toujours continué tant que ces gentilshommes ont eu besoin et ont bien voulu recevoir ce secours. Aussi ces moines, tout riches qu’ils sont, en ont recueilli la vénération de tout leur pays : ils la méritent sans doute et d’être proposés en exemple. J’ai regret d’avoir oublié le nom de ces gentilshommes, qui doivent être d’ancienne race. Orcamp est si près de Paris que ce nom est aisé à retrouver.