Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 17.djvu/333

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autant de choix un ennemi du cardinal de Noailles, qui, par l’éminence de ce grand siège, devînt un personnage nécessaire, sûr en même temps pour eux et propre à lui opposer. D’autres qualités, il ne s’en embarrassa guère, l’autorité et la violence suppléant aisément à tout. Dès qu’il ne s’agissoit que des deux premières il ne lui fallut pas chercher beaucoup pour trouver son fait. La naissance, les entours de Mailly, le siège d’Arles qu’il occupoit depuis longtemps, et où il avoit presque toujours résidé, rendirent facile sa translation à Reims. Mailly gagna tout à ce changement, et n’y perdit pas même la facilité qu’il avoit à Arles pour son commence et ses intrigues à Rome, sur lequel la rigueur de la cour étoit peu à peu tombée par les manéges du P. Tellier, aux vues duquel cette liberté étoit devenue nécessaire. Ainsi Mailly, devenu plus considérable à Rome par l’éclat de son nouveau siège et par sa proximité de Paris et de la cour, redoubla d’efforts à Rome, et n’oublia rien ici, pour en mériter l’objet de ses désirs. L’affaire de la constitution lui en présenta tous les moyens qu’il en saisit avec avidité, et qui lui fournit ceux d’exercer sa haine contre le cardinal de Noailles. L’orgueil souffroit toutefois de se voir avec son siège, son zèle, son affinité avec Mme de Maintenon, si loin derrière les cardinaux de Rohan et de Bissy, et confondu avec d’autres évêques ; mais ce fut une épreuve qu’il fallut essuyer dans l’espérance du chemin qu’elle lui feroit faire. Ainsi s’écoulèrent les restes du règne du roi et les premiers temps de la régence. La constitution y ayant enfin pris le dessus, Mailly s’unit étroitement à Bentivoglio, tous deux dévorés du désir de la pourpre, et tous deux persuadés qu’ils ne se la pouvoient accélérer qu’en mettant tout en feu. Mailly donc n’aspira plus qu’à se faire le martyr de Rome, ne garda plus de mesures, abandonna Rohan, Bissy et les plus violents évêques, comme de tièdes politiques, qui abandonnoient le saint-siège et la cause de l’Église. De là ses lettres et ses mandements multipliés, le double mérite qu’il