Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 17.djvu/485

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avec Armenonville. Qu’une folie de cette nature ait passé par la tête de quelqu’un, il y a de quoi s’en étonner, mais de la faire examiner comme chose susceptible de l’être sérieusement, cela fait voir à quel point le régent étoit facile à ce qui n’avoit point de contradicteur. M. de Montbéliard du temps du feu roi s’étoit contenté de vouloir faire légitimer ses enfants et en avoit été refusé ; maintenant il veut qu’ils soient non pas légitimés, mais déclarés légitimes. On se moqua de lui et il s’en retourna chez lui. Qui ne croiroit cette chimère finie ? Elle reparut à Vienne avec les mêmes prétentions ; elle y fut foudroyée par le conseil aulique qui déclara tous ces enfants bâtards. Ce ne fut pas tout. Le prince de Montbéliard maria un de ses fils à une de ses filles, sous prétexte que la mère de cette fille l’avoit eue d’un mari à qui il l’avoit enlevée, puis épousée, et longtemps après il fut vérifié que cette fille étoit de lui, quoiqu’ils ne l’aient pas avouée et que le mariage ait subsisté. Après ce sceau de réprobation, M. de Montbéliard mourut.

Le duc de Wurtemberg, à qui ce partage de cadet de sa maison revenoit par l’extinction de cette branche, voulut s’en mettre en possession ; les bâtards se barricadèrent et portèrent leurs prétentions au parlement de Paris. Ils étoient réunis contre le duc de Wurtemberg, mais divisés entre eux, ceux de chacune des deux prétendues femmes se traitant réciproquement de bâtards. Le frère et la sœur mariés vinrent à Paris ; le mari n’étoit qu’un lourdaud, mais sa femme une maîtresse intrigante. Ces sortes de créatures se sentent de loin les unes les autres. Mme de Mezières, dont il a été parlé quelquefois ici et qui excelloit en intrigues, avoit marié une de ses filles à M. de Montauban, cadet du feu prince de Guéméné, au grand regret des Rohan, qui pourtant, l’affaire faite, jugèrent à propos de s’aider d’une si dangereuse créature, pour ne l’avoir pas contraire dans leur famille, et tirer parti de sa fertilité. Elle et cette bâtarde qui avoit épousé son propre frère firent connoissance ; la