Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 17.djvu/83

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la couronne, il falloit bouleverser l’État et mettre tout en feu plutôt que se les laisser arracher. »

Ces ameutements, en apparence contre les ducs, ou le gros des ameutés furent les premiers trompés, ne furent en effet pratiqués que pour se fortifier contre les princes du sang depuis que l’aigreur se fut mise entre eux par le procès de la succession de M. le Prince, et empêcher le régent de juger la demande formée contre eux par les princes du sang et d’en rayer la qualité avec le prétendu droit d’habilité factice de succéder à la couronne. Aussi réussirent-ils à lui faire une telle peur qu’il en éluda le jugement contre ses paroles souvent données, contre toute justice, raison et bienséance, et qu’il ne céda, après tant de délais, de subterfuges, de tours de souplesse, qu’aux cris et à une véritable obsession des princes du sang, qui se relevèrent à rie le pas laisser respirer. C’est ce qui parut mieux encore par la démarche beaucoup plus que hardie, à laquelle se porta le duc du Maine, d’invoquer avec éclat la majorité du roi et les états généraux comme seuls compétents d’un jugement de cette nature ; qui n’étoit pas moins faire qu’anéantir les lois autant qu’il étoit en lui, l’autorité du roi mineur et celle du régent du royaume, et en donner à tous les sujets le dangereux et très coupable exemple. Enfin ce qui se peut appeler le premier tocsin de l’éclat dont nous allons parler, fut la fameuse requête signée de cette prétendue noblesse, dont M. le duc d’Orléans avoit été si longtemps et si volontiers la dupe, ainsi qu’elle-même en gros, par rapport aux ducs, et présentée au parlement par six seigneurs, desquels six la plupart portoient sur le front l’attachement au duc du Maine ; tocsin, dis-je, de ce qui se tramoit, si le régent passoit outre au jugement par lequel le duc et la duchesse du Maine sentoient bien que la qualité de princes du sang et l’habilité donnée aux bâtards par le feu roi de succéder à la couronne ne pouvoit manquer d’être anéantie. Depuis le moment de l’arrêt qui prononça cet anéantissement, et son enregistrement,