Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 18.djvu/307

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de politesse, ce qu’il avoit dit de cette lettre à la signature. Il ajouta qu’il n’y avoit qu’à se conformer à ce qui se passeroit à Paris au contrat de mariage du prince des Asturies, et qu’encore qu’il arrivât qu’il n’y en fût pas signé d’instrument en espagnol, le roi d’Espagne venoit de le charger de m’assurer qu’il ne feroit aucune difficulté de signer un instrument en françois du contrat de mariage du roi, si je persévérois ce nonobstant à le désirer. J’en remerciai extrêmement ce ministre, auquel et encore moins au roi d’Espagne je ne voulus pas témoigner la moindre chose sur Maulevrier dont le froid, l’embarras et le silence portoient sa condamnation sur le front. Je ne voulus mander cette altercation qu’au cardinal Dubois, et rien de cela à M. le duc d’Orléans, ni dans la dépêche du roi qui se lisoit au conseil de régence, et encore ne m’en pris-je dans ma lettre au cardinal qu’à un oubli ou à un défaut de mémoire de Maulevrier, avec lequel je continuai de vivre comme auparavant, avec la politesse et les égards dus au caractère que je lui avois apporté, et conférant avec lui de tout ce qui regardoit l’ambassade, tellement qu’il vint continuellement dîner chez moi, souvent familièrement sans que je l’en priasse, et qu’il ne parut à qui que ce fût que j’en fusse mécontent.

Ce n’étoit pas que je ne sentisse toute la conduite si pourpensée et si parfaitement exécutée d’une noirceur si peu méritée, dont la perfidie me commit d’une manière si publique en présence du roi et de la reine d’Espagne, et de tout ce que leur cour avoit de plus grand ; mais la façon dont j’en sortis, pleine des bontés du roi d’Espagne aussi publiques ; l’affront tacite que Maulevrier reçut dans une si auguste assemblée de [m’avoir] laissé ou plutôt induit à m’embarquer en cet instrument françois, en ayant la négative en main de celle du cardinal Dubois, d’en être convaincu par le ministre espagnol, à qui il l’avoit montrée, et par son propre aveu de me l’avoir cachée ; l’indécence de me brouiller et de vivre mal en pays