Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 19.djvu/231

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

et arrivèrent en même temps que le roi. Je la vis de même avec beaucoup de seigneurs vis-à-vis d’elle, fort proches, et la vîmes très bien. Elle est assez longue, je vais tâcher de l’expliquer. L’heure fut donnée pour le…. [1].

Le duc de Liria, accompagné du prince de Masseran, aussi chevalier de la Toison, vint me prendre avec mon fils aîné dans son carrosse, attelé de quatre parfaitement beaux chevaux de Naples, et se mirent tous deux sur le devant, quoi que mon fils et moi pûmes faire. Mais ces beaux napolitains, qui sont extrêmement fantasques, ne voulurent point démarrer. Coups de fouets redoublés, cabrioles, ruades, fureurs, prêts à tous moments à se renverser. Cependant l’heure se passoit, et je priai le duc de Liria que nous nous missions dans mon carrosse pour ne pas faire attendre le roi et tout le monde. J’eus beau lui dire que cela ne pouvoit nuire à sa fonction de parrain, puisque nous étions dans son carrosse, et que ce n’étoit que par la force de la nécessité que nous en prendrions un des miens, il ne voulut jamais y entendre. Ce manège dura une demi-heure entière, au bout de laquelle les chevaux consentirent enfin à partir.

Tout mon cortège nous accompagnoit et suivoit, comme à ma première audience et comme à la couverture de mon second fils. Je voulois toujours faire voir aux Espagnols le cas que je faisois des grâces du roi d’Espagne et des honneurs de leur cour. Au milieu du chemin la fantaisie reprit aux chevaux de s’arrêter et de recommencer leur manège ; moi à insister de nouveau à changer de carrosse, et le duc de Liria à n’en point vouloir ouïr parler. Cette pause néanmoins fut bien moins longue ; mais comme nous partions vint un message du roi dire qu’il nous attendoit. Enfin, nous arrivâmes, et dès que le roi en fut averti, il sortit, prit ses colliers de la manière que j’ai expliquée, traversa une pièce, entra dans une autre fort grande, où le chapitre étoit disposé.

  1. L’heure est laissée en blanc dans le manuscrit.