Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 19.djvu/251

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Ce qui me surprit au dernier point fut la paix et la tranquillité d’un enfant de ce petit âge, qui, accoutumé à ses femmes, se trouva là sans pas une au milieu de tous visages à lui inconnus et bizarrement vêtus, se laisser porter, mettre sur les genoux, se laisser affubler d’un manteau, manier les pieds ou au moins leur voisinage, puis remporter sans jeter un cri ni une larme, et regarder tout ce monde inconnu sans frayeur et sans impatience.

Le lendemain 9, le roi et la reine seuls s’en allèrent pour quatre jours en relais à Balsaïm, uniquement accompagnés du duc del Arco, du marquis de Santa-Cruz, du comte de San-Estevan de Gormaz, capitaine des gardes en quartier ; de Valouse, de la princesse de Robecque, dame du palais ; de la nourrice de la reine, et d’une seule camériste. Je les vis partir assez matin, et fort peu après dîner je me mis en marche par la ville, pour commencer mes adieux, comptant -prendre congé de Leurs Majestés Catholiques fort peu de jours après leur retour de Balsaïm.

Dans la première que je fis, par laquelle on savoit chez moi que je devois commencer, on vint m’avertir de l’arrivée d’un courrier qui m’étoit annoncé depuis longtemps et toujours différé parce qu’il devoit m’apporter des réponses et des ordres sur plusieurs choses auxquelles le cardinal Dubois n’avoit jamais le temps de travailler. Je m’en revins donc chez moi tout court. Je trouvai d’abord une lettre du cardinal Dubois, qui m’envoyoit une relation de tout ce qui s’étoit fait à Paris à l’arrivée de l’infante, et des fêtes qui l’avoient suivie, pour la présenter et la faire valoir au roi et à la reine d’Espagne ; une boîte de lettres de toute la maison d’Orléans sur le mariage de la princesse des Asturies, qui étoient bien tardives ; et ce que j’attendois avec impatience, la lettre de remerciement de M. le duc d’Orléans au roi d’Espagne, sur les grâces que j’en avois reçues, et celles du cardinal Dubois sur le même sujet au P. Daubenton et au marquis de Grimaldo. Il y en avoit des