Page:Saint-Victor - Tableau historique et pittoresque de Paris, 1827, T4 P1.djvu/47

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  • dacieux de ce parti montra, dès ce moment, ce

dont il étoit capable, par le coup hardi qu’il sut frapper, et qui fut décisif pour ses vastes et ambitieux desseins. Il fit répandre adroitement dans le peuple par ses émissaires, que le grand pensionnaire et son frère, Corneille de Witt, trahissoient leur pays et le livroient au roi de France, à qui ils étoient vendus, et eut l’art de rendre vraisemblables ces bruits calomnieux. Les deux frères, contre lesquels il nourrissoit d’ailleurs d’implacables et profonds ressentiments[1], furent assassinés dans une émeute qu’il avoit su également susciter ; et c’est alors que l’on vit paroître au premier rang, sur ce grand théâtre de la politique européenne, cet homme extraordinaire, le plus dangereux ennemi de Louis XIV, et dont le génie supérieur comprit mieux cette politique que ceux qui étoient le plus intéressés à la bien comprendre,

1 Les deux frères s’étoient mis à la tête de la faction dite de Louvestein, dont le but étoit d’abattre la maison d’Orange, la grandeur de cette maison, depuis l’entreprise hardie du père de Henri Guillaume sur la ville d’Amsterdam, leur semblant incompatible avec la sûreté et l’indépendance de leur pays. Il n’étoit point d’efforts forts qu’ils n’eussent faits pour y parvenir ; c’étoit dans cette intention qu’ils avoient recherché l’appui de la France ; et ils seroient parvenus à ce but s’ils eussent pu conserver une aussi puissante protection. Déjà ils avoient fait abolir la dignité de stathouder ; et le prince d’Orange avoit été forcé de jurer qu’il ne l’accepteroit jamais, quand même elle lui seroit offerte.