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M. JULES JANIN.

forme tant du linge que des habits, il semblait que, sans être tout à fait des religieuses, les Filles de l’Enfance eussent déjà pour règle le code mignon de Gresset :

Il est aussi des modes pour le voile ;
Il est un art de donner d’heureux tours
À l’étamine, à la plus simple toile.

« Elles garderont, était-il dit, un juste tempérament, qui ne fasse pas rire les fous et qui ne contriste pas les sages, qui ne les fasse pas remarquer par la légèreté de la mode, ni par le ridicule d’un usage passé… Elles seront bien propres sans curiosité, nettes sans délicatesse, et bien mises sans afféterie. » Qu’on joigne à cela de bonnes œuvres, l’éducation gratuite des jeunes filles, l’instruction des Calvinistes nouvelles converties, le soin des pauvres, et l’on aura quelque idée de cet Institut habilement concerté, fait pour séduire, attrayant, et utile peut-être, mais empreint évidemment d’un reste d’orgueil humain, et même de coquetterie mondaine. L’abbé de Ciron pouvait être lié avec quelques amis et disciples de Saint-Cyran, l’Institut fondé par Mme de Mondonville put être persécuté à ce titre, et finalement détruit, comme une succursale que les Jansénistes avaient dans le midi de la France : mais ce n’était pas là et ce ne fut jamais l’esprit pur du sévère et intègre Port-Royal. Cela saute aux yeux, et M. Janin l’a pu tout d’abord faire remarquer.

Ce qui ne faisait pas une moindre différence, et qui ne laisse pas de surprendre au premier coup d’œil, c’est cette espèce de commerce dévot, sans rien de sensuel, on veut le croire, mais trop propre à faire jaser et sourire, entre l’abbé de Ciron, ancien prétendant, et Mme de Mondonville, jeune encore. Ce M. de Ciron, d’ailleurs, paraît avoir été un homme vertueux, d’une charité qui