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CAUSERIES DU LUNDI.

de magnifiques exemples de liberté et de vertu. Les plus belles pages de l’histoire sont consacrées à célébrer ces généreux citoyens qui ont affranchi leur pays. Et lorsque, des hauteurs où cette pensée nous transporte, on abaisse ses regards sur l’état actuel de l’Europe, lorsque l’on songe que ce sont ces mêmes Cabinets que nous avons vus pendant trente ans si complaisants envers tous les Gouvernements nés de notre Révolution, qui ont successivement traité avec la Convention, recherché l’amitié du Directoire, brigué l’alliance du Dévastateur du monde ; lorsque l’on songe que ce sont ces mêmes Ministres que nous avons vus si empressés aux Conférences d’Erfurt qui viennent maintenant, gravement, de leur souveraine science et pleine autorité, flétrir de noms injurieux la cause pour laquelle Hampden est mort au champ d’honneur et lord Russell sur l’échafaud, en vérité le sang monte au visage ; on est tenté de se demander : Qui sont-ils enfin, ceux qui prétendent détruire ainsi, d’un trait de plume, nos vieilles admirations, les enseignements donnés à notre jeunesse, et jusqu’aux notions du beau et du juste ? À quel titre oseraient-ils nous dire, comme le pontife du Très-Haut disait au Sicambre qui s’est assis le premier sur le trône des Gaules : Brûle ce que tu as adoré, adore ce que tu as brûlé ! »


En citant ces éloquentes et généreuses paroles, loin de moi la pensée de mettre un noble esprit en contradiction avec lui-même pour ce qu’il disait alors et pour ce qu’il a dû faire depuis ! Mais j’ai à le suivre rapidement dans sa marche, et ce qui m’apparaît de plus saillant, je le relève.

Que si vous le voulez absolument, mettez ce noble discours en regard d’autres discours plus récents du même honnête homme politique, lesquels ne sont ni moins sentis, ni moins animés d’un accent de vérité, et vous aurez sous les yeux en abrégé toute la leçon de l’expérience, l’éternelle leçon qui recommence toujours.

Le second discours, dont il est impossible de ne pas faire mention, est celui qu’il prononça le 4 avril 1826 sur le projet de loi relatif au droit d’aînesse. Le sujet y est traité sous toutes ses faces. Venu l’un des derniers