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Page:Sainte-Beuve - Causeries du lundi, XIII, 3e éd.djvu/171

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M. RIGAULT.

fait de la question physique : elles en ont depuis compris bien d’autres. On voit l’abbé de Pons, en ces années, devenir un des rédacteurs actifs et des soutiens de ce Nouveau Mercure qui cherchait à se régénérer. C’est là que parurent successivement sa Dissertation sur les Langues en général., et sur la Langue française en particulier, en tête du numéro de mars 1717 ; ses Réflexions sur l’Éloquence, en tête du numéro de mai 1718 ; son Nouveau Système d’éducation, en tête du numéro de juillet, même année : notre auteur, toutes les fois qu’il y écrit, a de droit la place d’honneur dans le Mercure. Ce sont, à vrai dire, des articles de revue, pas si gros qu’aujourd’hui, point massifs, mais assez solides, très-fins, et où il y a toujours de la pensée. L’abbé de Pons est un des premiers écrivains qui s’annoncent comme pouvant être plus sérieux et de plus longue haleine que l’écrivain de gazette et de journal, n’allant pas tout à fait jusqu’au livre, mais très-propre à cette littérature d’entre-deux et de recueil périodique. Il y met du solide, il y garde de la vivacité.

Je reprends les diverses pièces que je viens d’énumérer. — Dans sa Dissertation sur le Poëme épique, contre la doctrine de madame Dacier (1717), l’abbé de Pons a raison sur presque tous les points, excepté un seul que nous dirons à la fin. Madame Dacier, d’après Aristote fortifié et corroboré par le Père Le Bossu, définissait le poëme épique : « un discours en vers, inventé pour former les mœurs par des instructions déguisées sous l’allégorie d’une action générale et des plus grands personnages. » L’abbé ne se paye pas de ces mots d’école et de ce galimatias ; le poëme épique, selon lui, sans tant de façons, c’est tout uniment celui dans lequel le poëte raconte l’action, de même que tout poëme dans lequel les personnages parlent et agissent est plus ou moins du genre dramatique. Prenant le sujet de Titus et Bérénice dont