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THÉOPHILE GAUTIER. 323

rendre ; mais l’apparence et la physionomie de la nature. Tout lfart est là.v» ‘

Dans l’appréciation’des tableaux, il a toujours maintenu l’importance ou mieux la prédominance absolue du point de vue pittoresque. Il l’a dit, une fois entre autres, en termes excellents, à propos de Meissonier : a Tout prend une valeur sous son pinceau et s’anime de cette mystérieuse vie de l’art, qui ressort d’une contre-basse, d’une bouteille, d’une chaise, aussi bien que d’un visage humain. Quoiqu’il puisse sembler ne pas avoir de compositions dans le æns vulgaire du mot, comme, au point de vue pittoresque, il arrange ses tableaux ! Comme il sait choisir le pu ? pitre, le tabouret, le papier do musique, le livre, la table, le chevalet ou le carton, selon la figure qu’il représente ! Quelle‘ harmonie entre- les accessoires et le personnage, et quelle pénétrante impression de la scène ou de l’époque, obtenue sans eflbrtl n

Il le redit, non moins excellemment, dans un article sur Ary Scheffer, en faisant remarquer que cet esprit si distingué et si élevé n’a pas assez compris que la’ pensée pittoresque n*avait rien de commun avec ‘la pensée poétique : « Un effet d’ombre ou de clair, une ligne d’un tour rare, une attitude nouvelle, un type frappant par sa beauté ou sa bizarrerie, un contraste heureux de couleur, voilà des pensées comme en trouvent dans le spectacle des choses les peintres de tempérament, les peintrès-nés. » Aussi, tout en rendant justice aux sentiments et aux intentions épurées de Ace a poëte de la peinture » comme il l’appelle, il ne l’a louéentoute sincérité et franchise que pour certains portraits où lé