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DE JOSEPH DELORME

Durant nos soirs d’hiver, ou l’été dans nos bois,
Pour lui remplir le cœur c’est assez de ma voix ;
Tout d’elle m’appartient ; mon amour l’environne,
Et ma main à loisir lui tresse une couronne,
Une noble couronne aux immortelles fleurs,
Et dont en rêve un Dieu m’a donné les couleurs.


Une légère teinte d’ironie n’est-elle pas répandue dans cette pièce, et le poëte n’y affecte-t-il pas, comme à plaisir, la langueur sentimentale ? C’est une simple conjecture que nous soumettons a la sagacité du lecteur.

(Note de l’Éditeur.)



PENSÉE D’AUTOMNE


Jardin du Luxembourg, novembre.


Au déclin de l’automne, il est souvent des jours
Où l’Année, on dirait, va se tromper de cours.
Sous les grands marronniers, sous les platanes jaunes,
Sous les pâles rideaux des saules et des aunes,
Si par un levant pur ou par un beau couchant
L’on passe, et qu’on regarde aux arbres, tout marchant,
À voir sur un ciel blanc les noirs réseaux des branches,
Et les feuilles à jour, aux inégales tranches,
Creuses par le milieu, les deux bords en croissants,
Figurer au soleil mille bourgeons naissants ;
Dans une vapeur bleue, à voir tous ces troncs d’arbre
Nager confusément avec leurs dieux de marbre,
Et leur cime monter dans un azur si clair ;
À sentir le vent frais qui parfume encor l’air ;