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PORT-ROYAL.

Au milieu des choses vraies et piquantes qu’on peut recueillir dans les aveux du Janséniste irrévérent, on remarquera pourtant qu’il n’y a aucune place pour ces hommes simples, d’humble et secrète vertu, comme l’était son ancien commensal M. de Bernières, son ancien maître M. Walon de Beaupuis, son ami M. Peydeau, qu’il était allé une fois visiter dans l’un des ses lieux d’exil, en compagnie de M. de Lalane. Il semble que le spirituel M. d’Aubigny ne les fasse point entrer en ligne de compte.

Je le soupçonne d’avoir été, — d’avoir fini par être de l’avis de Saint-Évremond lui-même en ces matières. Saint-Êvremond a écrit sur la Religion des réflexions d’une grande finesse, et d’une impartialité aussi entière qu’on peut l’attendre d’un moraliste qui n’est pas croyant. C’est sans doute après en avoir discouru plus d’une fois, et être tombé d’accord avec son aimable ami, qu’il arrêta ses idées sur les avantages que la Religion procure au véritable et parfait religieux :

{{t| « Le véritable Dévot rompt avec la nature, si on le peut dire ainsi, pour se faire des plaisirs de l’abstinence des plaisirs ; et, dans l’assujettissement du corps à l’esprit, il se rend


    longtemps à la Cour sur M. d’Aubigny pour le comprendre au nombre de ceux à qui on envoya des lettres de cachet : mais, ajoute-t-il, la considération de Madame la Princesse Palatine et de M. le Vicomte de Turenne, qui lui étoient unis par une amitié particulière, le fit distinguer d’avec ceux que l’on enveloppoit dans cette affaire. » > M. Hermant a, d’ailleurs, grand soin de faire remarquer que, sur les vicaires généraux et les chanoines atteints alors pour cette manifestation de dévouement au cardinal de Retz, il en était peu qu’on pût appeler sérieusement des « disciples de saint Augustin ». Et quant à M. d’Aubigny, « on l’en avoit soupçonné, dit-il, mais sans aucun autre fondement, sinon qu’il ne pouvoit souffrir les maux que l’on faisoit aux disciples de saint Augustin et qu’on les appelât hérétiques ; mais il n’en avoit jamais étudié les matières. » M. d’Aubigny ne fut jamais qu’un janséniste de circonstance et par générosité.