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18 novembre 1775 jusqu’au 21 juin 1777 ; la seconde depuis le 16 mars jusqu’au 9 août 1778 ; la troisième depuis le 9 janvier jusqu’au 8 décembre 1782. C’est à ce moment que, le marquis de Sainte-Croix ayant succédé comme ministre plénipotentiaire à M. Sabatier, Léonard se retira et rentra en France. Grétry, dans le même temps, arrivait à Liége, et y recevait des ovations patriotiques que la correspondance de M. de Sainte-Croix mentionne et que Léonard eût été heureux d’enregistrer.

Les dépêches de celui-ci, adressées à M. de Vergennes et conservées au dépôt des Affaires étrangères, sont au nombre de soixante ; plus de dépêches en tout que d’idylles. On s’aperçoit aisément, en y jetant les yeux, que le poëte diplomate redouble d’efforts, et que, novice en cela peut-être, il s’applique à justifier par son zèle la distinction dont il est honoré. Les affaires de la France avec le Prince et les États de Liège étaient nécessairement très-petites ; affaires surtout de libellistes à poursuivre et de déserteurs à réclamer. Pourtant, par Liège, on avait les communications libres tant avec la Basse-Allemagne, dont cet État faisait partie, qu’avec la Hollande, dont les Pays-Bas autrichiens nous tenaient séparés. L’intérêt des Pays-Bas était de mettre un mur entre la France et Liège pour fermer cette voie d’écoulement à notre commerce. La France, au contraire, cherchait à faciliter le passage. Aussi presque toutes les dépêches de Léonard roulent sur l’exécution de certaines routes et chaussées, de certains canaux qui avaient été stipulés par un traité récent. Il faut voir comme le tendre auteur des Deux Ruisseaux s’y évertue. Le Prince-Évêque a l’air d’être bien disposé pour la France ; mais il ne fait pas de ses États ce qu’il veut. Ceux-ci tâchent de tirer de Versailles un secours d’argent pour les routes demandées. Le chancelier ou chef du ministère du prince est au fond moins favorable que son maître. Il s’agit de pénétrer ses vues, de s’assurer que le secours, si on le donne, sera bien affecté à l’emploi promis. Il y a là un autre M. de Léonard qui n’est