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Par tes vaillants reîtres
Les félons et traîtres
 Déconfits ! –

J’entends un vieux garde,
Qui de loin regarde
 Fuir l’éclair,
Qui chante et s’abrite,
Seul en sa guérite,
 Contre l’air.

Je vois l’ombre naître,
Près de la fenêtre
 Du manoir,
De dame en cornette
Devant l’épinette
 De bois noir.

Et moi, barbe blanche,
Un pied sur la planche
 Du vieux pont,
J’écoute, et personne
A mon cor qui sonne
 Ne répond.

– Comte, en qui j’espère,
Soient, au nom du Père, etc.

Voilà des rimes et un rhythme qui, ce semble, suffiraient à dater la pièce à défaut d’autre indication. C’était le moment de la ballade du roi Jean et de la ballade à la Lune, le lendemain de la Ronde du Sabbat et la veille des Djinns. L’espiègle Trilby faisait des siennes, et Hoffmann aussi allait opérer. Bertrand, dans sa fantaisie mélancolique et nocturne, était fort atteint de ces diableries ; on peut dire qu’entre tous il était et resta féru du lutin, cette fine muse :Quem tu Melpomene semel....

Son rôle eût été, si ses vers avaient su se rassembler et se publier alors, de reproduire avec un art achevé, et même