Page:Sainte-Beuve - Tableau de la poésie française au XVIe siècle, éd. Troubat, t1.djvu/91

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Ne souffrez pas que Dangier soit seigneur,
En conquestant soubs son obéissance
Ce que tenez en vostre gouvernance ;
Avancez-vous et garder vostre honneur ;
Rafraischissez le chastel de mon Cueur.



Prenez tost ce baisier, mon Cueur,
Que ma maistresse vous présente,
La belle, bonne, jeune et gente,
Par sa très-grant grâce et doulceur.

Bon guet feray, sur mon honneur,
Afin que Dangier riens n’en sente.
Prenez tost ce baisier, mon Cueur,
Que ma maistresse vous présente.

Dangier, toute nuit en labeur,
A fai guet ; or gist en sa tente.
Accomplissez brief vostre entente,
Tandis qu’il dort ; c’est le meilleur.
Prenez tost ce baisier, mon Cueur.



Fuyez le trait de Doulx regard,
Cueur qui ne vous savez deffendre :
Veu qu’estes désarmé et tendre,
Nul ne vous doit tenir couard.

Vous serez pris ou tost ou tard,
S’Amour le veult bien entreprendre.
Fuyez le trait de Doulx regard,
Cueur qui ne vous savez deffendre.