décrit plus tard par Marot, et a tout autant de délicatesse [1].
Si nous passons de Charles d’Orléans à Villon [2], le contraste a lieu de nous surprendre. Ce dernier, écolier libertin et fripon, véritable enfant de Paris, élevé dans quelque boutique de la Cité ou de la place Maubert, a un ton qui, pour le moins autant que celui de Regnier, se sent des lieux que fréquentait l’auteur. Ses plus tolérables espiègleries consistent à voler le vin du cabaretier, la marée des halles, ou le chapon du rôtisseur [3]. Les beautés qu’il célèbre, j’en rougis pour lui, ne sont rien autres que la blanche savatière ou la gente saulcissière du coin. Comme Charles d’Orléans, il a connu la prison, mais cette prison est le Châtelet, et il pourra bien n’en sortir que pour Montfaucon ; déjà même l’épitaph est prête [4], la complainte patibulaire est rimée. S’il échappe, c’est grâce à Louis XI,
- ↑ Et l’un et l’autre s’inspirent de la première partie du Roman de la Rose.
- ↑ Charles d’Orléans né en 1391, mort en 1465 ; Villon né vers 1431.
- ↑ Voir les Repues franches, dont Villon est le héros, quoiqu’il n’en soit pas l’auteur. Voir aussi l’espièglerie un peu cruelle que raconte de lui Rabelais. Les apostrophes à la savetière et à la saulcissière sont dans la pièce intitulée : Ballade et Doctrine de la belle Heaulmière aux Filles de joie, laquelle est insérée au Grand Testament.
- ↑ L’épitaphe de Villon est connue : Je suis François dont ce me poise, etc. La complainte patibulaire est intitulée : Épitaphe en forme de ballade, que fit Villon pour lui et pour ses compagnons, s’attendant à être pendu avec eux.