Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/213

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élevé, à une distance à peu près égale des deux camps. Ce fut là que, selon les conventions, eut lieu l’entrevue. César plaça à deux cents pas de ce tertre la légion qu’il avait amenée sur les chevaux des Gaulois. Les cavaliers d’Arioviste s’arrêtèrent à la même distance ; celui-ci demanda que l’on s’entretînt à cheval, et que dix hommes fussent leur seule escorte à cette conférence. Lorsqu’on fut en présence, César commença son discours par lui rappeler ses bienfaits et ceux du sénat : « Il avait reçu du sénat le nom de roi, le titre d’ami ; on lui avait envoyé les plus grands présents, faveur accordée à peu d’étrangers, et qui n’était d’ordinaire que la récompense d’éminents services. Il avait, lui, sans y avoir aucun droit, sans titre suffisant pour y prétendre, obtenu ces honneurs de la bienveillance et de la libéralité de César et du sénat. Il lui rappela aussi les liens aussi anciens que légitimes qui unissaient les Héduens à la république ; les nombreux et honorables sénatus-consultes rendus en leur faveur ; la suprématie dont ils avaient joui de tout temps dans la Gaule entière, avant même de rechercher notre amitié ; l’usage du peuple romain étant de vouloir que ses alliés et ses amis non seulement ne perdissent rien de leur puissance, mais encore gagnassent en crédit, en dignité, en honneur. Comment souffrir que ce qu’ils avaient apporté dans l’alliance romaine leur fût ravi ? » Il finit par lui réitérer les demandes déjà faites par ses députés, qu’il ne fît la guerre ni aux Édues ni à leurs alliés ; qu’il rendît les otages ; et, s’il ne pouvait renvoyer chez eux aucune partie des Germains, qu’au moins il ne permît pas à d’autres de passer le Rhin.

XLIV. Arioviste répondit peu de choses aux demandes de César, et parla beaucoup de son mérite personnel. « Il n’avait point passé le Rhin de son propre mouvement, mais à la prière et à la sollicitation des Gaulois ; il n’aurait pas quitté son pays et ses proches sans la certitude d’une riche récompense. Les établissements qu’il possédait dans la Gaule lui avaient été concédés par les Gaulois eux-mêmes ; ils avaient donné volontairement des otages ; il levait par le droit de la guerre les contributions que les vainqueurs ont coutume d’imposer aux vaincus ; les Gaulois avaient commencé les hostilités bien loin que ce fût lui ; les peuples de la Gaule étaient venus l’attaquer en masse et poser leur camp en face du sien ; il avait, dans un seul combat, vaincu et dispersé toutes ces forces ; s’ils veulent de nouveau tenter le sort des armes, il est de nouveau prêt à combattre ; s’ils préfèrent la paix, il est injuste de lui refuser le tribut qu’ils avaient jusque-là payé de leur plein gré ; l’amitié du peuple romain devait lui apporter honneur et profit et non pas tourner à son détriment ; il l’avait recherchée dans cet espoir. Si Rome intervient pour lui enlever ses subsides et ses tributaires, il renoncera à son amitié avec autant d’empressement qu’il l’avait désirée. S’il faisait passer dans la Gaule un grand nombre de Germains, c’était pour sa propre sûreté et non pour attaquer les Gaulois ; la preuve c’est qu’il n’était venu que parce qu’on l’avait appelé ;