Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/258

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l’île de Mona[1]. L’on croit qu’il y en a plusieurs autres de moindre grandeur, dont quelques écrivains ont dit qu’elles étaient, vers la saison de l’hiver, privées de la lumière du soleil pendant trente jours continus. Nos recherches ne nous ont rien appris sur ce point : nous observâmes seulement, au moyen de certaines horloges d’eau, que les nuits étaient plus courtes que sur le continent. La longueur de ce côté de l’île est, selon l’opinion de ces écrivains, de sept cent mille pas. Le troisième côté est au nord et n’a en regard aucune terre, si ce n’est la Germanie à l’un de ses angles. Sa longueur est estimée à huit cent mille pas. Ainsi le circuit de toute l’île est de vingt fois cent mille pas.

XIV. De tous les peuples bretons, les plus civilisés sont, sans contredit, ceux qui habitent le pays de Cantium, région toute maritime et dont les mœurs diffèrent peu de celles des Gaulois. La plupart des peuples de l’intérieur négligent l’agriculture ; ils vivent de lait et de chair et se couvrent de peaux. Tous les Bretons se teignent avec du pastel, ce qui leur donne une couleur azurée et rend leur aspect horrible dans les combats. Ils portent leurs cheveux longs, et se rasent tout le corps, excepté la tête et la lèvre supérieure. Les femmes y sont en commun entre dix ou douze, surtout entre les frères, les pères et les fils. Quand il naît des enfants, ils appartiennent à celui qui le premier a introduit la mère dans la famille.

XV. Les cavaliers ennemis avec leurs chariots de guerre attaquèrent vivement dans sa marche notre cavalerie, qui fut partout victorieuse et les repoussa dans les bois et sur les collines ; mais, après avoir tué un grand nombre d’ennemis, son ardeur à en poursuivre les restes lui coûta quelques pertes. Peu de temps après, comme les nôtres ne s’attendaient à rien et travaillaient au retranchement du camp, les Bretons, s’élançant tout à coup de leurs forêts et fondant sur la garde du camp, l’attaquèrent vigoureusement. César envoie pour la soutenir deux cohortes, qui étaient les premières de leurs légions ; comme elles avaient laissé entre elles un très petit espace, l’ennemi, profitant de leur étonnement à la vue de ce nouveau genre de combat, se précipite avec audace dans l’intervalle et échappe sans perte. Q. Labérius Durus, tribun militaire, fut tué dans cette action. Plusieurs autres cohortes envoyées contre les Barbares les repoussèrent.

XVI. Ce combat, d’un genre si nouveau, livré sous les yeux de toute l’armée et devant le camp, fit comprendre que la pesanteur des armes de nos soldats, en les empêchant de suivre l’ennemi dans sa retraite et en leur faisant craindre de s’éloigner de leurs drapeaux, les rendait moins propres à une guerre de cette nature. La cavalerie combattait aussi avec désavantage, en ce que les Barbares, feignant souvent de se retirer, l’attiraient loin des légions, et, sautant alors de leurs chars, lui livraient à pied un combat inégal ; or, cette sorte d’engagement était pour nos cavaliers aussi dangereuse dans la retraite que dans l’attaque. En outre, les Bretons ne combattaient jamais en masse,

  1. Anglesey.