Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/265

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XXXIV. Les Barbares au contraire ne manquèrent pas de prudence : car leurs chefs firent publier dans toute l’armée, « qu’aucun ne quittât son rang ; que tout ce que les Romains auraient abandonné serait la proie réservée au vainqueur ; que tout dépendait donc de la victoire. » Les nôtres ne leur étaient inférieurs ni en valeur ni en nombre ; quoique abandonnés de leur chef et de la Fortune, ils plaçaient encore dans leur courage tout l’espoir de leur salut ; et chaque fois qu’une cohorte se portait sur un point elle y faisait un grand carnage. Ambiorix s’en aperçut et fit donner à tous les siens l’ordre de lancer leurs traits de loin, de ne point trop s’approcher et de céder sur les points où les Romains se porteraient vivement : la légèreté de leur armure et l’habitude de ce genre de combat les préserveraient de tout péril : ils ne devaient attaquer l’ennemi que lorsqu’il reviendrait aux drapeaux.

XXXV. Cet ordre fut très fidèlement exécuté ; lorsqu’une cohorte sortait du cercle pour charger l’ennemi, il s’enfuyait avec une extrême vitesse. Cette charge laissait nécessairement notre flanc à découvert, et c’était là que se dirigeaient aussitôt les traits. Puis, quand la cohorte revenait vers le point d’où elle était partie, elle était enveloppée à la fois par ceux qui avaient cédé et par ceux qui s’étaient postés près de nos flancs. Voulait-elle tenir ferme, sa valeur devenait inutile, et ne pouvait la garantir, serrée comme elle l’était, des traits lancés par une si grande multitude. Toutefois, malgré tant de désavantages et tout couverts de blessures, nos soldats résistaient encore ; une grande partie du jour était écoulée, et ils avaient combattu depuis le point du jour jusqu’à la huitième heure, sans avoir rien fait qui fût indigne d’eux. Alors T. Balventio, qui, l’année précédente, avait commandé comme primipile, homme brave et considéré, a les deux cuisses traversées par un javelot. Q. Lucanius, du même grade, est tué en combattant vaillamment pour secourir son fils qui était enveloppé : le lieutenant L. Cotta, allant de rang en rang pour animer les cohortes, est blessé d’un coup de fronde au visage.

XXXVI. Effrayé de ce désastre, Q. Titurius, ayant de loin aperçu Ambiorix qui animait ses troupes, lui envoie son interprète Cn. Pompée pour le prier de l’épargner lui et ses soldats. À ce message, Ambiorix répond : « Que si Titurius veut conférer avec lui, il le peut ; qu’il espère obtenir de l’armée gauloise la vie des Romains ; qu’il ne serait fait aucun mal à sa personne et qu’il engage sa foi en garantie. » Titurius communique cette réponse à Cotta blessé, et lui propose, s’il y voit de l’avantage, de sortir de la mêlée, et d’aller conférer ensemble avec Ambiorix : il espère en obtenir le salut de l’armée et le leur. Cotta proteste qu’il ne se rendra point auprès d’un ennemi armé (9), et persiste dans ce refus.

XXXVII. Sabinus ordonne aux tribuns des soldats et aux centurions des premiers rangs qu’il avait alors autour de lui, de le suivre. Arrivé