Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/288

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avons fait mention dans le récit des combats précédents. Depuis cinq jours, il n’avait pas pris de nourriture. Inquiet sur le salut de tous et sur le sien, il sort sans armes de sa tente ; il voit combien l’ennemi est proche et le péril pressant, se saisit des premières armes qu’il aperçoit et se place à une porte. Les centurions de la cohorte qui était de garde le suivent ; et tous ensemble ils soutiennent quelque temps le combat. Grièvement blessé, Sextius perd connaissance ; on le passe de mains en mains, et on le sauve avec peine. Dans cet intervalle, les autres reprennent assez de courage pour oser rester sur le rempart et présenter l’apparence d’une défense.

XXXIX. Cependant nos soldats, revenant du fourrage, entendent des cris ; la cavalerie prend les devants et reconnaît toute l’imminence du danger. Il n’y a là aucun retranchement où ils puissent se retirer dans leur frayeur ; les soldats nouvellement levés et sans expérience de la guerre se tournent vers le tribun militaire et les centurions, et attendent leurs ordres. Nul n’est si brave que la vue du danger ne l’étonne. Les Barbares, apercevant de loin les enseignes, cessent leur attaque ; ils croient d’abord que c’est le retour des légions que les captifs avaient dit s’être portées au loin ; mais, bientôt, pleins de mépris pour ce petit nombre de troupes, ils fondent sur elles de toutes parts.

XL. Les valets courent sur une hauteur voisine. Chassés de ce poste, ils se replient en désordre sur les enseignes et sur les rangs des cohortes, et augmentent la frayeur des soldats. Les uns veulent qu’on forme le coin, afin de percer jusqu’au camp dont ils sont si près, espérant que si une partie d’entre eux est enveloppée et succombe, le reste du moins pourra se sauver ; d’autres veulent qu’on tienne ferme sur la colline, et que tous courent la même fortune. Cet avis n’est pas celui des vieux soldats que nous avons dit s’être mis en marche sous une même enseigne. Après s’être encouragés mutuellement, et sous la conduite de C. Trébonius, chevalier romain, qui les commandait, ils se font jour à travers les ennemis, et tous, jusqu’au dernier, ils rentrent au camp sans perte. Les valets et les cavaliers suivent l’impulsion, et sont sauvés par le courage des soldats. Mais ceux qui s’étaient arrêtés sur la colline, et à qui manquait toute expérience de l’art militaire, ne surent ni persévérer dans le parti qu’ils avaient pris de se défendre sur cette hauteur, ni imiter la vigueur et l’impétuosité qui avaient, sous leurs yeux, sauvé les autres ; en essayant de gagner le camp, ils s’engagèrent dans un lieu désavantageux. Les centurions, dont plusieurs avaient été, à cause de leur valeur, promus, des rangs inférieurs des autres légions, aux premiers grades de celle-ci, voulant conserver leur ancienne gloire militaire, se firent tuer en combattant vaillamment. Une partie des soldats, pendant que l’ennemi reculait devant tant de courage, put rentrer au camp, sauvée contre tout espoir ; le reste fut enveloppé par les Barbares et périt.

XLI. Les Germains, désespérant de forcer le camp, et nous voyant en état de défense sur les