Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/377

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guerre en Celtibérie. (3) Ce qui contribua encore à les déterminer, c’est que, dans la scission qui avait éclaté lors de la dernière guerre, les peuples vaincus qui s’étaient déclarés pour Sertorius redoutaient le nom du vainqueur même absent, et ceux qui avaient persisté dans leur alliance avec Pompée lui étaient d’autant plus affectionnés qu’il les avait comblés de bienfaits : le nom de César, an contraire, était presque ignoré de ces Barbares. (4) Afranius et Pétréius en attendaient beaucoup de cavalerie et de grands secours, et ils se flattaient que dans un pays, qui était sous leur dépendance, ils pourraient prolonger la guerre jusqu’à l’hiver. (5) Cette résolution prise, ils rassemblent de tous côtés des vaisseaux sur l’Èbre et les font conduire à Octogésa. Cette ville était située sur ce fleuve, à vingt mille pas de leur camp. (6) Là ils établissent un pont formé de bateaux rapprochés les uns des autres, font passer le Sicoris à deux légions, et fortifient le camp par un retranchement de douze pieds.

(1) César, en ayant été instruit par ses éclaireurs, fit travailler ses soldats jour et nuit à détourner le cours du Sicoris, et déjà il y avait si bien réussi que la cavalerie, quoique avec peine et difficilement, pouvait et osait traverser le fleuve ; (2) mais l’infanterie, qui avait de l’eau jusqu’aux épaules, était retenue autant par la profondeur que par la rapidité du fleuve. (3) Enfin, à peu près dans le même temps, on apprit que le pont sur l’Èbre était presque achevé, et le Sicoris se trouva guéable.

Retraite des Pompéiens

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(1) Ce fut pour les ennemis un nouveau motif de hâter leur départ. Laissant donc deux cohortes auxiliaires à la garde d’Ilerda, ils passent le Sicoris avec toutes leurs troupes, et rejoignent les deux légions qui l’avaient déjà passé les jours précédents. (2) Il ne restait à César qu’à envoyer sa cavalerie après eux pour les harceler et les troubler dans leur marche : car il lui fallait faire un trop grand détour pour gagner le pont qu’il avait construit, et les ennemis avaient un chemin beaucoup plus court pour arriver à l’Èbre. (3) Sa cavalerie part et traverse le fleuve ; puis, se montrant tout à coup à l’arrière-garde d’Afranius et de Pétréius, qui avaient levé leur camp à la troisième veille, elle l’enveloppe de tous côtés, la retarde et l’arrête dans sa marche.

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(1) Au point du jour, des hauteurs voisines du camp de César on voyait notre cavalerie, aux prises avec cette arrière-garde, la presser vivement et parfois la forcer à s’arrêter et à faire face ; ensuite toutes leurs cohortes se portaient contre les nôtres et les repoussaient par cette attaque ; puis, dès qu’elles s’étaient remises en marche, les nôtres recommençaient à les poursuivre. (2) À cette vue, les soldats s’assemblent par groupes partout dans le camp, se plaignant qu’on laisse échapper l’ennemi de leurs mains, et qu’on traîne la guerre en longueur sans nécessité : ils vont trouver leurs centurions et leurs tribuns : ils les conjurent d’assurer à César qu’il n’a besoin de leur épargner ni peines ni périls, qu’ils sont prêts à tout, qu’ils ne manquent ni de force ni d’audace