Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/381

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gens qui allaient à l’eau sont pressés par notre cavalerie. (3) Sur cet avis, ils disposent plusieurs postes de cavalerie et d’infanterie auxiliaire, les entremêlent de cohortes légionnaires, et commencent un retranchement de leur camp jusqu’à l’eau afin de pouvoir y aller à couvert, sans crainte et sans escorte. (4) Afranius et Pétréius se partagent le travail, et s’éloignent pour surveiller les travailleurs.

Conversations entre Pompéiens et Césariens

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(1) Les soldats profitent de cette absence pour s’entretenir librement avec les nôtres : ils sortent en foule du camp, et chacun d’eux cherche et appelle, parmi nos soldats, ceux qui sont de sa connaissance ou de son pays. (2) D’abord ce sont de tous côtés des actions de grâces : ils nous remercient de les avoir épargnés la veille, ils avouent qu’ils nous doivent la vie. Ensuite ils demandent s’ils peuvent compter sur la clémence de César, regrettant de n’y avoir pas eu recours plus tôt et de n’avoir pas pris les armes avec leurs amis et leurs proches. (3) De discours en discours ils demandent à César sa parole pour la vie d’Afranius et de Pétréius, afin qu’on ne puisse les accuser d’un crime, d’une odieuse trahison. Sur cette assurance, ils s’engagent à passer aussitôt dans le camp de César avec leurs enseignes, et lui envoient les centurions des premiers rangs pour traiter de l’accommodement. (4) En attendant ils s’invitent et se conduisent entre eux d’un camp à l’autre ; de sorte que les deux camps ne paraissent plus en former qu’un seul ; même un grand nombre de tribuns militaires et de centurions viennent trouver César et se recommandent à lui. (5) Les principaux Espagnols qu’ils avaient mandés au camp et qu’ils y gardaient comme otages, font de même : ils cherchaient des amis et des hôtes qui les présentassent à César. (6) Le fils même d’Afranius, qui était un adolescent, traitait de la vie de son père et de la sienne par l’entremise du lieutenant Sulpicius. (7) Ce n’était partout qu’allégresse et félicitations : les uns se réjouissaient d’avoir échappé à un si grand péril, les autres d’avoir terminé, sans répandre de sang, une affaire si importante. César recueillait, au jugement de tous, le précieux fruit de sa clémence, et chacun applaudissait à sa conduite.

Rupture des pourparlers

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(1) Informé de ce qui se passe, Afranius quitte les travaux et revient au camp, disposé, à ce qu’il paraissait, à supporter avec patience l’événement quel qu’il fût. (2) Quant à Pétréius, il ne désespère point ; il arme ses domestiques, y joint une cohorte prétorienne espagnole, et quelques cavaliers barbares qu’il avait à sa solde et qui lui servaient de garde ; il vole aussitôt aux retranchements, rompt les entretiens des soldats, chasse les nôtres du camp, et tue ceux qu’il saisit. (3) Les autres se rassemblent, effrayés par ce danger imprévu, s’enveloppent le bras gauche de leurs manteaux, et tirent l’épée ; puis, rassurés par la proximité du camp, ils se défendent contre l’infanterie espagnole et la cavalerie, et rentrent dans les retranchements, protégés par les cohortes qui étaient de garde aux portes.

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(1) Après cela Pétréius parcourt les rangs en pleurant, exhortant les soldats, les conjurant de ne point livrer à leurs ennemis et au supplice