Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/408

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les chances de la guerre ; (4) que leurs pertes à chacun devaient leur servir de leçon et d’avertissement pour leur en faire appréhender de nouvelles ; (5) que Pompée avait été expulsé d’Italie, après avoir perdu la Sicile, les deux Espagnes, et, dans ces pays, cent trente cohortes de citoyens romains ; que, de son côté, il avait à regretter la mort de Curion, le massacre de son armée d’Afrique, la reddition d’Antonius et de ses troupes près de Curicta ; (6) qu’ils devaient se ménager, eux et la république : qu’ils avaient l’un et l’autre assez appris à leurs dépens ce que peut la fortune dans la guerre ; (7) que le vrai moment pour traiter de la paix était celui où les deux partis n’avaient encore rien perdu de leur confiance et paraissaient égaux en forces ; que, pour peu que la fortune se déclarât en faveur de l’un d’eux, le plus heureux n’écouterait plus aucune proposition d’arrangement, et ne voudrait plus de partage dès qu’il croirait pouvoir tout garder ; (8) que, quant aux conditions, puisqu’ils n’avaient pu s’accorder jusqu’alors, ils devaient s’en remettre au jugement du sénat et du peuple ; (9) qu’en attendant il était de leur intérêt et de celui de la république, qu’ils s’engageassent l’un et l’autre sous serment, dans l’assemblée du peuple, à licencier leurs troupes dans l’espace de trois jours ; (10) qu’une fois qu’ils auraient déposé les armes et renoncé à tout secours étranger, ils n’auraient plus, l’un et l’autre, qu’à se soumettre à la décision du peuple et du sénat ; (11) que, quant à lui, pour mieux convaincre Pompée, il congédierait sur-le-champ toutes ses troupes et retirerait ses garnisons.

César s’empare d’Oricum et d’Apollonie

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(1) Vibullius, après avoir reçu ces instructions, crut qu’il n’était pas moins de son devoir d’avertir Pompée de la subite arrivée de César, afin qu’il pût prendre là-dessus ses mesures avant d’entendre ses propositions. En conséquence il marcha jour et nuit, prit des relais pour aller plus vite, et se rendit vers Pompée pour lui annoncer que César s’avançait avec toutes ses troupes. (2) Pompée se trouvait alors dans la Candavie ; et, de cette partie de la Macédoine à ses quartiers d’hiver, son chemin était par Apollonia et Dyrrachium ; mais, à cette nouvelle, troublé, il se dirigea à grandes marches sur Apollonia, dans la crainte que César ne s’emparât des villes maritimes de cette côte. (3) Celui-ci, après avoir débarqué ses troupes, marche le même jour sur Oricum. L. Torquatus, qui y commandait pour Pompée avec une garnison de Parthini, en avait fermé les portes, décidé à se défendre. (4) Dans ce dessein il ordonna aux Grecs de prendre les armes et de monter sur le rempart ; mais, comme ceux-ci refusèrent de combattre contre le peuple romain, et que les habitants, de leur côté, voulaient recevoir César, Torquatus, n’espérant plus aucun secours, ouvrit les portes de la place, et se rendit avec elle à César, qui ne lui fit aucun mal.

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(1) Maître d’Oricum, César se dirige aussitôt sur Apollonia. En apprenant son arrivée, L. Stabérius, qui y commandait, fait porter de l’eau dans la citadelle, la fait encore fortifier, et demande des otages aux habitants ; (2) mais ceux-ci les lui refusent, disant qu’ils ne veulent point