Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/426

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dans l’enceinte des retranchements, étaient consommés ; (4) il fallait que leurs vaisseaux fissent un long trajet pour apporter des fourrages de Corcyre et d’Acarnanie ; et comme ces provisions étaient insuffisantes, on était obligé de compléter les rations avec de l’orge. (5) Mais lorsque tout manqua, non seulement l’orge et le fourrage, mais les racines, mais les feuilles d’arbre jusqu’à la dernière, et que les chevaux tombèrent d’inanition, alors Pompée crut devoir tenter une sortie.

Les déserteurs Allobroges

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(1) Il y avait dans la cavalerie de César deux frères Allobroges, Roucillus et Écus, fils d’Abducillus, lequel avait longtemps tenu le premier rang dans sa nation ; c’étaient des hommes d’un rare courage, et ils avaient admirablement servi César dans toutes les guerres des Gaules. (2) César, pour les récompenser, leur avait confié, dans leur pays, les plus importantes magistratures ; il les avait fait recevoir au sénat, malgré l’usage établi ; il leur avait donné dans la Gaule des terres prises sur l’ennemi et de grandes sommes d’argent ; enfin, de pauvres qu’ils étaient, il les avait rendus très riches. (3) Ils n’étaient pas moins, pour leur valeur, chéris de l’armée qu’estimés de César mais, fiers de ses bontés, et pleins de cette arrogance grossière qui n’appartient qu’à des Barbares, ils méprisaient leurs compatriotes, retenaient la solde de leurs cavaliers, et faisaient passer chez eux tout le butin. (4) Ceux-ci, irrités de ces injustices, vinrent en corps trouver César et se plaignirent hautement ; ils ajoutaient de plus que leurs chefs produisaient de faux états du nombre des cavaliers, et en détournaient la paie.

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(1) César, qui ne croyait pas le moment bien choisi pour punir, et qui d’ailleurs avait beaucoup d’égards pour leur bravoure, se contenta de les reprendre en particulier de ce qu’ils mettaient ainsi leurs cavaliers à rançon ; il leur dit d’attendre tout de son affection et de juger de l’avenir par ses bienfaits passés. (2) Cette réprimande ne laissa pas que de leur attirer le mépris et la haine de toute l’armée ; ce qu’ils comprirent aisément, tant par les reproches d’autrui que par le témoignage de leur propre conscience. (3) Dans cette situation, la boute, et peut-être la crainte que leur châtiment ne fût que différé, les décida à nous quitter, à tenter une nouvelle fortune, et à essayer de nouvelles amitiés : (4) ils communiquèrent leur dessein à quelques gens de leur suite, auxquels ils crurent pouvoir confier un si noir complot, et résolurent d’abord, comme on le sut plus tard, après la guerre, de tuer C. Volusénus, préfet de la cavalerie, afin de ne pas se présenter à Pompée sans lui apporter un gage de leur dévouement. (5) Mais, comme l’entreprise était trop difficile, et qu’ils ne trouvèrent pas l’occasion favorable, ils se bornèrent à emprunter le plus d’argent possible, sous prétexte de restituer à leurs cavaliers ce qu’ils leur avaient retenu par fraude ; et, après avoir acheté un grand nombre de chevaux, ils se rendirent au camp de Pompée avec leurs complices.

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(1) Comme ils étaient de grande naissance, équipés d’une manière brillante, qu’ils avaient