Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/446

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bannis. (4) Nos esclaves fugitifs trouvaient dans Alexandrie une retraite assurée et une certaine existence, dès qu’ils se faisaient enregistrer au nombre des soldats. Si quelqu’un d’eux était arrêté par son maître, tous accouraient et l’arrachaient de ses mains, parce que, également coupables, ils défendaient leur propre cause. (5) Selon une ancienne coutume de l’armée d’Alexandrie, ils pouvaient demander la mort des favoris qui leur déplaisaient, s’enrichir par le pillage des riches, assiéger le palais de leurs rois, ôter et donner la couronne. Il y avait en outre deux mille cavaliers (6) vieillis dans les guerres d’Alexandrie : c’étaient ceux qui avaient rétabli Ptolémée, tué les deux fils de Bibulus, et fait la guerre aux Égyptiens. Ils avaient donc assez d’expérience de la guerre.

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(1) Achillas, plein de confiance dans ses troupes, et méprisant les soldats peu nombreux de César, s’empara de la ville, à l’exception du quartier que celui-ci occupait ; et où il essaya d’abord de le forcer dans sa maison ; mais César, ayant distribué ses cohortes à l’entrée des rues, soutint son attaque. (2) Dans le même temps on se battait aussi du côté du port, ce qui mit beaucoup d’acharnement dans la lutte. (3) En effet, tandis que nos troupes divisées combattaient dans plusieurs rues de la ville, la multitude des ennemis s’efforçait de s’emparer de la flotte, laquelle consistait en cinquante galères qu’on avait envoyées au secours de Pompée, et qui, après la bataille de Pharsale, étaient revenues au port. Ces galères étaient à trois et à cinq rangs de rames, et pourvues de tout ce qui était nécessaire pour la navigation. De plus, il y en avait vingt-deux autres, toutes pontées, lesquelles formaient la station ordinaire d’Alexandrie. (4) S’ils avaient réussi à s’en emparer, une fois maîtres de la flotte, ils avaient à eux le port et toute la mer, et empêchaient les vivres et les secours d’arriver jusqu’à César. (5) Aussi l’action fut-elle aussi vive qu’elle devait l’être entre des soldats dont les uns cherchaient dans le succès une prompte victoire, et les autres leur salut : (6) mais César l’emporta. Ne pouvant, avec si peu de troupes, occuper un si vaste terrain, il brûla toutes ces galères ainsi que celles qui étaient dans les arsenaux ; et aussitôt après, il alla faire une descente au Phare.

César occupe le Phare. Dissessions dans l’armée égyptienne. Exécution de Pothin

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(1) Le Phare est une tour très élevée, d’une architecture merveilleuse, bâtie dans une île dont elle porte le nom. (2) Cette île, située en face d’Alexandrie, en forme le port ; des môles de neuf cents pas de long, jetés dans la mer par les anciens rois du pays, unissent, par un canal étroit et par un pont, le Phare à la ville. (3) Il y a dans cette île des habitations d’Égyptiens qui forment un bourg de la grandeur d’une ville ; et quand quelque vaisseau s’écarte de sa route par imprudence ou par la violence du vent, les habitants le pillent, à la façon des corsaires. (4) L’entrée du port est si étroite qu’aucun vaisseau n’y peut pénétrer malgré ceux qui occupent le Phare. (5) C’est avec la crainte de trouver ces obstacles que César, tandis que l’ennemi se battait ailleurs, débarqua ses troupes dans le Phare