Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/502

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violent orage mêlé d’une grêle aussi grosse que des pierres. Les troupes en souffrirent d’autant plus, que César ne les tenait point en quartiers d’hiver, selon l’usage des autres généraux ; elles changeaient de camp tous les trois ou quatre jours pour se rapprocher de l’ennemi, et sans cesse occupées à se retrancher, elles n’avaient pas le temps de se reconnaître. D’ailleurs, en faisant embarquer les troupes en Sicile, il avait ordonné qu’il n’entrât dans les vaisseaux que la seule personne du soldat avec ses armes : il n’avait permis ni vases, ni esclaves, ni aucune espèce d’ustensiles. En Afrique, bien loin que l’armée eût pu s’y pourvoir de rien, la cherté des vivres l’avait forcée de dépenser ce qu’elle avait. Nos soldats étaient si misérables, que peu d’entre eux avaient des tentes de peaux ; les autres s’étaient fait des abris, en guise de petites tentes, avec leurs vêtements ou avec des roseaux entrelacés de branchages. Aussi, dans cette occasion, accablés par la grêle et la pluie, appesantis par l’eau, tous les feux éteints, toutes les provisions détruites ou gâtées, ils erraient çà et là dans le camp, se couvrant la tête de leurs boucliers. Cette même nuit, le fer des javelots de la cinquième légion parut tout en feu.

XLVIII. Cependant le roi Juba, instruit du combat de cavalerie qu’avait soutenu Scipion, et prié par ses lettres de le venir joindre, laissa le préfet Saburra avec une partie de ses troupes pour faire face à Sittius, et, afin de rassurer l’armée de Scipion et d’effrayer celle de César, il prit avec lui trois légions, huit cents hommes de cavalerie régulière, un grand nombre de cavaliers Numides qui ne se servaient pas de brides, un fort parti d’infanterie armée à la légère, et trente éléphants. En arrivant près de Scipion, il campa à part avec ses troupes, à peu de distance de lui. Au bruit de son approche, la terreur s’était répandue dans le camp de César, et l’armée l’attendait pleine d’inquiétude ; mais dès qu’on le vit à portée de nos retranchements, on méprisa ses troupes et toute crainte s’évanouit ; sa présence dissipa la haute idée que de loin on avait conçue de lui. Du reste, il fut aisé de voir combien son arrivée avait relevé le courage et la confiance de Scipion ; car, dès le jour suivant, il fit sortir toutes ses troupes et celles du roi avec soixante éléphants, et les rangea en bataille dans un grand appareil ; il marcha en avant de ses retranchements un peu plus loin que de coutume, et un moment après rentra dans son camp.

XLIX. César voyant que Scipion avait à peu près reçu tous les secours qu’il attendait et que le combat ne serait plus différé, s’avança avec ses troupes par les hauteurs, fit tirer des lignes de communication de l’une à l’autre, construisit des forts sur chacune, et s’approcha de Scipion de plus en plus, en s’emparant de tous les points élevés. Les ennemis, en comptant sur la multitude de leurs troupes, se saisirent d’une colline voisine, et, par ce moyen, ils arrêtèrent sa marche. Labié-