Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/654

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les faisceaux qu’on leur avait livrés. Plus audacieux que les autres, Appius en vint à un tel degré d’insolence, qu’il destinait à sa brutalité une jeune fille de condition libre, oubliant et Lucrèce et les rois et le Code de lois que lui-même avait composé. Voyant donc sa fille frappée par un jugement, et traînée en servitude, Virginius n’hésite pas ; il la tue de sa main au milieu du Forum ; et, faisant avancer ses compagnons d’armes avec leurs enseignes, du haut du mont Aventin il assiége les décemvirs, et précipite toute cette puissance dans les prisons et dans les fers (89).

XXV. — Troisième sédition. — (An de Rome 308). — La troisième sédition fut excitée par l’ambition des mariages et par la prétention des plébéiens, de s’allier aux patriciens ; cette dissension éclata sur le mont Janicule, à l’instigation de Canuléius, tribun du peuple.

XXVIQuatrième sédition. — (An de R. 377-382). — La quatrième sédition eut sa source dans la passion des honneurs, les plébéiens voulant avoir part aux magistratures. Fabius Ambustus, père de deux filles, avait marié l’une à Sulpicius, d’origine patricienne, l’autre au plébéien Stolon. Celle-ci, entendant un jour dans la maison de sa sœur, le bruit des verges du licteur, inconnu dans la sienne, en ressentit une frayeur dont elle fut raillée par l’épouse de Sulpicius d’une manière assez piquante. Elle ne put supporter l’affront ; aussi son mari, parvenu au tribunat, arracha-t-il au sénat, malgré sa résistance, le partage des honneurs et des magistratures.

Au reste, jusque dans ces séditions, le peuple roi est digne d’admiration. En effet, tantôt c’est pour la liberté, tantôt pour la pudeur, ici pour la noblesse de la naissance, là pour la majeste et l’éclat des honneurs, qu’il a combattu tour à tour : mais, au milieu de toutes ces luttes, il ne fut de nul intérêt gardien plus vigilant que de la liberté ; et aucune largesse offerte pour prix de cette liberté ne put le corrompre, bien que du sein d’une multitude nombreuse et toujours croissante, il apparût de temps à autre des citoyens dangereux. Spurius Cassius et Mélius, soupçonnés d’aspirer à la royauté, l’un par la proposition de la loi Agraire, l’autre par ses libéralités, furent punis par une mort prompte. Ce fut son père même qui fit subir à Spurius son supplice ; Mélius fut tué au milieu du Forum par le maître de la cavalerie, Servilius Ahala, d’après l’ordre du dictateur Quinctius. Quant à Manlius, le sauveur du Capitole, qui, pour avoir libéré la plupart des débiteurs, affectait une hauteur contraire à l’égalité, il fut précipité de cette forteresse qu’il avait défendue.

Tel fut le peuple romain au dedans et au dehors, dans la paix et dans la guerre, pendant la fougue de son adolescence, c’est-à-dire dans le second âge de l’empire, intervalle durant lequel il soumit par ses armes toute l’Italie, depuis les Alpes jusqu’au détroit.


LIVRE DEUXIÈME.

I. — Avant-propos. — L’Italie était domptée et soumise, le peuple romain, qui comptait près de cinq cents ans de durée, avait réellement at-