Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/699

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à la mort et les y fait conduire. Ce fut comme la condamnation de cette cité, qu’il ordonna de détruire.

XXIII. Guerre de Sertorius. — (An de Rome 675-679.) — La guerre de Sertorius fut-elle autre chose que l’héritage des proscriptions de Sylla ? Je ne sais si je dois l’appeler étrangère ou civile ; faite, il est vrai, par les Lusitaniens et les Celtibères, elle le fut sous un général romain.

Fuyant dans l’exil les tables de mort, Sertorius, cet homme d’une héroïque mais bien funeste vertu, remplit de ses disgrâces la terre et les mers. Après avoir tenté la fortune et en Afrique et dans les îles Baléares, il s’engagea sur l’Océan et pénétra jusqu’aux îles Fortunées[1]. Enfin il arma l’Espagne. Un homme de cœur trouve facilement à s’allier à des gens qui lui ressemblent. Jamais la valeur du soldat espagnol n’éclata davantage que sous un général romain. Non content de l’appui de l’Espagne, celui-ci jeta les yeux sur Mithridate, sur les peuples du Pont, et fournit une flotte à ce roi. Quels dangers cette alliance ne présageait-elle pas ? Rome ne pouvait résister avec un seul général à un si puissant ennemi. A Métellus on adjoignit Cnaeus Pompée. Ils affaiblirent, par des combats multipliés, mais toujours sans résultat définitif, les forces de Sertorius, qui succomba enfin, non pas à nos armes, mais à la scélératesse et à la perfidie des siens. On poursuivit ses troupes par toute l’Espagne, et on les accabla par des batailles fréquentes et jamais décisives.

Les lieutenants de chaque parti engagèrent les premiers combats. Domitius et Thorius d’un côté, les deux Herculéius de l’autre préludèrent à la guerre. Ceux-ci furent vaincus près de Ségovie, ceux-là sur les bords de l’Ana[2] ; et les généraux, se mesurant bientôt eux-mêmes, à leur tour, essuyèrent chacun une égale défaite près de Laurone[3] et de Sucrone[4]. Les uns se mirent alors à ravager les campagnes, les autres à ruiner les villes ; et la malheureuse Espagne porta la peine de la discorde qui régnait entre les généraux romains. Enfin Sertorius périt par une trahison domestique ; Perperna fut vaincu et livré aux Romains, qui reçurent alors la soumission des villes d’Osca, de Termes, de Tutia, de Valence, d’Auxime et de Calaguris[5], qui avait souffert toutes les horreurs de la famine. Ainsi l’Espagne fut rendue à la paix. Les généraux vainqueurs voulurent faire regarder cette guerre plutôt comme étrangère que comme civile, pour obtenir le triomphe.

XXIV. — Guerre civile de Lépidus. — (An de Rome 675.) — Sous le consulat de Marcus Lépidus et de Quinctus Catulus s’éleva une guerre civile qui fut étouffée presque à sa naissance. Mais, allumé au bûcher de Sylla, combien le flambeau de cette discorde devait étendre au loin l’incendie ! Lépidus, avide de nouveautés, eut la présomption de vouloir abolir les actes de cet homme extraordinaire ; entreprise qui ne laissait pas que d’être juste, si toutefois son exécution n’eût pas causé un grand dommage à la république. Sylla, étant dictateur, avait, par le droit de la guerre, proscrit ses ennemis ; rappeler ceux qui survivaient, n’était-ce pas, de la part de Lépidus, les

  1. Les Canaries.
  2. Aujourd’hui la Guadana.
  3. Aux environs de Valence.
  4. Dans la même province, sur la rivière du même nom, appelée aujourd’hui Xucar.
  5. Huesca, dans la province d’Aragon. — Thermes dans la même province. Osmo, dans la Vieille Castille, Calahorra, ibid.