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CONTES

son âme se complaisait sans nul artifice. Sur les murs de son palais, une suite de fresques grandioses ou charmantes racontaient…

Devant ces glorifications ingénieuses ou sublimes de la vie, des sympathies frémissaient en lui, et il sentait qu’elles correspondaient aux plus impérieux besoins de sa sensibilité. Dans le palais qu’il possédait près de la mer, et qui était célèbre par la magnificence de ses jardins, des fêtes se succédaient sans trêve. La nuit, sous l’ardente lumière des grands lustres, Rovère, assis à la table du festin, en respirait l’atmosphère heureuse et fébrile ; les serviteurs affairés se croisaient, portant des plats et des aiguières ; les gorges des femmes étincelaient ; les pyramides de fruits s’écroulaient sur la nappe parmi les orfèvreries, et dans l’intense douceur des musiques mêlées aux parfums, Rovère, tournant entre ses doigts la tulipe de cristal où il buvait un vin doré, croyait vivre, sur la terre, la vie même des dieux.