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ŒUVRES DE ALBERT SAMAIN

que rien de profond n’avait été atteint chez lui, et sa vitalité, un moment perturbée, repartait en poussée plus vigoureuse avec l’indifférence tenace des choses naturelles. Néanmoins, pour éviter un contact trop sensible avec des milieux et des objets tout pleins encore de souvenirs, il décida d’entreprendre un grand voyage.

Il partit, visita les plus beaux pays, et trouva pour son âme avide et souple, dans la magnificence changeante des spectacles, des motifs nouveaux de s’enthousiasmer. Par là aussi son esprit s’agrandit, se fortifia. Averti par la diversité des peuples, des mœurs, des arts, il élargit son horizon de pensées et s’achemina à concevoir des formes moins fixes de sentir.

Souvent, la nuit, accoudé à la proue, pendant que le navire glissait doucement dans les ténèbres, il songeait. La mer, autour de lui, s’étendait infinie ; sur sa tête, les constellations brillaient, dessinant sur le firmament sombre