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CONTES


Angisèle fut sauvée et revint à la vie, mais en demeurant si faible qu’il semblait que le mal ne lui eût accordé qu’un simple répit. Or, à mesure que la vie revenait dans son corps dévasté, un surprenant changement moral s’accusait en elle. Tous les instincts, murés jusque-là dans le plus sombre in pace de son âme religieuse, se faisaient jour à la fois et jaillissaient, heureux et libres, à travers son être. C’était comme un retour miraculeux au paradis enfantin ; ses gestes, ses propos, ses pensées avaient l’expansion naïve de l’innocence ; et dans le jardin tiède de sa convalescence son âme souriait, candide, originale et nue !

Quand elle regardait Rovère, ses yeux se remplissaient d’un calme ravissement, et elle se donnait tout entière à l’amour, comme une fleur à la lumière.

Comme on était au commencement de la belle saison, le ciel clément accordait çà et là un azur sans nuages.