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LIBRAIRIE BLANCHARD.
Rue Richelieu, 78
LIBRAIRIE MARESCQ ET Cie,
5, rue du Pont-de-Lodi.
J. HETZEL, ÉDITEUR.


ŒUVRES DE GEORGE SAND


ILLUSTRÉES PAR TONY JOHANNOT

PRÉFACE

En publiant une édition complète de mes ouvrages dans le format le plus populaire aujourd’hui et au plus bas prix, je n’ai eu ni le dessein de m’enrichir en cas de succès, ni la prétention de faire un grand sacrifice dans le cas contraire. Mais je puis dire que ce qui m’a le plus préoccupé, c’est le désir de faire lire à la classe pauvre ou malaisée, des ouvrages dont une grande partie a été composée pour elle. J’ai dû attendre pour m’y décider que l’habitude générale consacrât l’usage d’un format qui ne me semblait pas commode, et qui néanmoins l’est devenu par l’habitude même.

J’ai voulu encore essayer de donner au peuple une édition aussi soignée que possible sans augmenter d’un centime le prix de ces sortes de publications, et je crois y avoir réussi grâce aux soins généreux et intelligents de l’ami qui s’est fait mon éditeur.

Enfin, j’ai été heureuse d’obtenir le concours d’un grand talent pour l’illustration de cette longue série d’ouvrages que j’offre à un peuple très-artiste et très-capable d’apprécier les choses d’art.

Dans cette longue série, plusieurs ouvrages (je puis dire le plus grand nombre), ont été inspirés par le désir d’éclairer le peuple sur ses devoirs autant que sur ses droits. Quelques-uns, les premiers surtout, n’ont été que le cri d’une âme fortement impressionnée, atteinte parfois de doute et de découragement ; peu pressée de conclure parce qu’elle craignait d’avoir à maudire l’humanité, qu’elle éprouvait le besoin d’aimer. Peu à peu la lumière s’est faite dans ce chaos d’émotions diverses, à mesure que l’âge y amenait la réflexion. Ses instincts avaient toujours été révolutionnaires, en ce sens que l’injustice était un spectacle antipathique pour ma nature, et qu’un immense besoin d’équité chrétienne avait rempli ma vie dès mon plus jeune âge ; mais la confiance dans mes instincts ne m’est venue que peu à peu, avec la certitude que le progrès est la loi vitale de l’humanité, et à mesure que je sentais ce progrès s’opérer en moi-même. Qui se sent vivre, sent et saisit la vie dans les autres ; et cette vie des autres vient alimenter et étendre la sienne propre. Je suis donc arrivée, sans grands efforts et sans fortes études, à cet état de lucidité dans la conviction où peut arriver toute âme sincère, sans qu’il lui soit besoin d’une trempe supérieure. Ce que je suis, tout le monde peut l’être ; ce que je vois, tout le monde peut le voir ; ce que