Page:Sand - Adriani.djvu/220

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lissements du Temple. Ayant deviné très au-delà de la réalité, et commençant à ressentir pour son artiste une sorte d’attachement, il ne voulut pas gloser davantage sur ses amours. En outre, Comtois comptait pour rien d’avoir travaillé comme un nègre toute la journée, et ce qu’il appelait être utile à son maître eût consisté, selon lui, en dorloteries à sa personne, accompagnées de conversations intéressantes. La conversation était le rêve de Comtois, et toute préoccupation contraire de la part de ses maîtres lui paraissait constituer le délit d’ingratitude.

Quand Adriani se trouva seul dans le petit salon rajeuni et parfumé du Temple, il essaya le piano, qu’il avait fait tirer de sa caisse et replacer au centre de l’appartement. Le local était devenu moins sonore ; le chant, plus voilé, semblait plus intime et plus mystérieux. Puis, accablé de fatigue, l’artiste se jeta sur une chaise dans un coin. Il ne voulait pas fouler le premier divan de velours réservé à Laure. Il regardait l’ensemble de son ornementation, que vingt bougies allumées rendaient plus gaie. Il se rappelait le moment où il était entré en ce lieu après la fuite de Laure, et, comparant l’effroi et la détresse qu’il avait éprouvés à l’espoir et à la joie qu’il y apportait maintenant, il regardait dans cette vie de quatre ou cinq jours comme dans un rêve.

— Et si elle n’arrivait pas ! se dil-il tout à coup ; si