Page:Sand - Adriani.djvu/232

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le vendrais peut-être pas cent cinquante mille cette année. Je serais littéralement sans pain, puisque, devant deux cent mille francs, je n’aurais pas même de quoi désintéresser mes créanciers. C’est grave ! je ne suis plus jeune, et, s’il me fallait subir l’humiliation des poursuites, je me brûlerais la cervelle.

— Ainsi, en vendant Mauzères aujourd’hui trois cent mille francs, si cela était possible, vous auriez encore cent mille francs pour vivre ?

— Je m’estimerais fort heureux ; car, avec les intérêts, dont je paye seulement une partie, je n’ai pas le revenu de cette somme.

— Eh bien, mon ami, voulez-vous me vendre Mauzères ?

— À vous, mon cher Adriani ? Non. Pour la moitié de la somme qu’il me faudrait, vous trouverez, en ce moment, vingt propriétés dans ce pays-ci, qui seront de la même valeur.

— N’importe, dit Adriani, j’aime Mauzères et je paye la convenance : c’est rationnel et légitime.

— Vous me sauvez ! s’écria le baron.

Mais il eut un scrupule d’honnête homme et se ravisa.

— Non, non, reprit-il, je ne dois pas vous laisser faire cette folie ! vous avez deux motifs pour la faire : votre amour d’abord, je le devine de reste ; et puis la généreuse idée de sauver un ami !