Page:Sand - Adriani.djvu/239

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mour, d’amitié ou de charité, de poésie ou de confiance chevaleresque, auprès duquel ses satisfactions matérielles n’avaient eu qu’une faible part dans le désastre.

Il s’était rendu compte de ses risques, il les avait affrontés et subis avec une philosophie enjouée. Il comprenait donc sa situation présente et ne se serait pas exposé à un risque nouveau, du moment que sa nouvelle fortune était à ses yeux un moyen de liberté dans le rêve de son amour. Il ne s’effraya pas de la lettre de Descombes, et cependant il se hâta de lui renouveler son injonction.

Il passa la journée du lendemain auprès de Laure. Elle était plus belle que de coutume, et, en quelque sorte, radieuse. Chaque jour amenait un progrès immense. Elle se décida à chanter avec lui, et ce fut un ravissement nouveau pour l’artiste. Elle chantait, non pas avec autant d’habileté, mais avec autant de pureté et de vérité qu’Adriani lui-même, dans l’ordre des sentiments doux et tendres. Adriani savait à quoi s’en tenir sur le mérite des difficultés vaincues. La plupart des cantatrices de profession sacrifient l’accent et la pensée aux tours de force, et, dans les salons de Paris ou de la province, la jeune fille ou la belle dame qui a su acquérir la roulade à force d’exercice éblouit l’auditoire en écrasant du coup la timide romance de pensionnaire.

À ces talents misérables et rebattus, Adriani préférait