Page:Sand - Adriani.djvu/252

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— Ah ! mon pauvre enfant ! s’écria-t-il, vous êtes perdu, et moi aussi ! Mais c’est ma faute !… Ah ! les voilà, ces biens de la terre ! Leur source est impure et ils ne profitent pas aux honnêtes gens. Pourquoi les poètes et les artistes veulent-ils posséder ! Leur lot en ce monde a toujours été et sera toujours d’errer comme Homère, une lyre à la main et les yeux fermés !

— Rassurez-vous sur votre compte et sur le mien, mon ami, répondit l’artiste en l’embrassant. Mon désespoir est assez grand ; ne l’aggravons pas par de vaines craintes ; vous n’êtes pas ruiné, ni moi non plus. Mon avoir est resté intact. J’avais défendu au pauvre Descombes d’en disposer.

— Non, vous dites cela pour rassurer ma conscience. Courons chez Bosquet, et rendons-lui cet à-compte.

— Laissez donc ! dit Adriani en remettant le portefeuille dans les mains de son ami ; je vous donne ma parole d’honneur que M. Bosquet sera soldé dans huit jours et que je serai propriétaire de Mauzères comme vous de vos cinq mille livres de rente. Allons, du courage ! je verrai Bosquet en passant à Tournon ; je le tranquilliserai, s’il est inquiet. Achevez vos emballages et venez me rejoindre à Paris. Je ne puis vous attendre un seul jour : mon pauvre ami respire encore et m’attend. D’ailleurs, je suis trop accablé pour être un agréable compagnon de voyage.