Page:Sand - Adriani.djvu/66

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Elle eut un imperceptible mouvement comme pour secouer sa tête endolorie, afin d’en écarter l’idée fixe, et, reprenant la parole avec une certaine volubilité, comme si elle eût craint d’oublier, avant de l’avoir dit, ce qu’elle voulait dire :

— C’est vrai, dit-elle ; le baron de West est mon proche voisin, à ce qu’il paraît. Je ne le vois pas, et c’est uniquement par sauvagerie, par inertie. Je sais que son caractère est aussi honorable que son talent. On l’aime et on l’estime beaucoup dans le pays. Il est venu me rendre visite ; j’étais souffrante, je n’ai pu le recevoir ; mais il a trop d’esprit pour ne pas savoir qu’une personne comme moi est tout excusée d’avance, et que, si je ne le prie pas de revenir, la privation est toute pour moi et non pour lui.

— Je suis sûr, madame, que M. de West pense tout le contraire.

Elle ne répondit pas. Je vis qu’il lui était presque impossible de soutenir une conversation, non qu’elle y éprouvât de la répugnance, mais parce qu’elle avait perdu absolument l’habitude d’échanger ses idées. Je me levai, très-peu désireux dès lors de profiter des bonnes intentions de Toinette, qui me faisait jouer un personnage indiscret et importun. Mais, en ce moment, la vieille folle arrivait et me criait d’un air triomphant :