Page:Sand - Andre.djvu/227

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première journée qu’il avait passée avec Geneviève au Château Fondu, et qu’il avait conquise par une fuite pareille.

Ils trouvèrent la patache, inclinée sur son brancard, à la porte d’un cabaret, dans un petit village de la Marche. Il ne faisait pas encore jour. Le conducteur savourait un cruchon de vin du pays, acide comme du vinaigre, et qu’il préférait fièrement à celui des meilleurs crus. Joseph et André jetèrent un regard empressé autour de la salle, qu’éclairait faiblement la lueur d’un maigre foyer. Ils aperçurent Geneviève assise dans un coin, la tête appuyée sur ses mains et le corps penché sur une table. André la reconnut à son petit châle violet, qu’elle avait serré autour d’elle pour se préserver du froid du matin, et à une mèche de cheveux noirs qui s’échappait de son bonnet et qui brillait sur sa main comme une larme. Succombant à la fatigue d’une nuit de cahots, la pauvre enfant dormait dans une attitude de résignation si douce et si naïve qu’André sentit son cœur se briser d’attendrissement. Il s’élança et la serra dans ses bras en la couvrant de baisers et de sanglots. Geneviève s’éveilla en criant, crut rêver, et s’abandonna aux caresses de son amant, tandis que Joseph, ému péniblement, leur tourna le dos, et, dans sa colère, donna un grand coup de pied au chat qui dormait sur la cendre du foyer.

Geneviève voulait résister et poursuivre sa route.