Page:Sand - Antonia.djvu/283

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vent, consentit à recevoir la visite de quelques religieuses, leur parut très-bonne personne, promit de lire quelques livres nouveaux que Marcel lui apporta et qu’elle n’ouvrit pas, prépara un ouvrage de broderie qu’elle ne commença point, vécut à peu près inaperçue dans le cloître, grâce à la tranquillité de ses manières, et continua à dépérir, lentement, sans crise, mais sans relâche.

Marcel fut trompé par les apparences. Voyant le moral si paisible et prenant cette subite destruction de la volonté pour une immense force de volonté aux prises avec la nature, il chercha le remède où il n’était pas. Il se préoccupa des conditions de la santé physique. Il loua une petite maison de campagne à Nanterre, et, faisant croire à Julie qu’il venait de l’acquérir pour son compte, il l’y transporta ; puis, s’étant assuré de la discrétion et du dévouement de Camille, il l’y fit conduire. Il remit à cette fille assez d’argent pour qu’elle pût prendre à gages une paysanne sachant faire la cuisine, et il veilla à ce que l’ordinaire de la comtesse fût plus choisi et plus substantiel que celui du couvent, La maisonnette était située en bon air, avec un assez grand jardin bien clos de murs et pas assez ombragé pour que le soleil ne l’assainît pas pleinement. Il fit porter dans le salon les livres, les petits objets de travail et d’amusement, enfin la harpe de Julie (toute femme de cette époque jouait peu ou prou de cet instrument gracieux). Camille, à qui Marcel avait fait la leçon, trompa sa maîtresse sur ce qui