Page:Sand - Antonia.djvu/339

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à tout rompre, et, avant qu’aucun domestique eût eu le temps de se lever pour voir de quoi il s’agissait, Julien ouvrit à Marcel et à madame Thierry ; il les fit entrer et referma les portes.

— Ah ! mon enfant, s’écria madame Thierry, j’étais bien sûre, moi, de te trouver ici ! Victoire, mon Julien, mon pauvre Julien ! Ah ! je ne sais ce que je dis ; tu vas être guéri, nous t’apportons le bonheur !

Quand Julie apprit ce qui s’était passé à Sèvres, la vie revint en elle comme elle revient à une plante demi-morte qui reçoit la pluie. Ses nerfs se détendirent dans des larmes de joie. Quant à Julien, malade la veille presque dangereusement, brisé encore le matin même, il fut guéri comme ces paralytiques qu’un bienfaisant coup de tonnerre fait bondir et marcher.

Après une heure d’effusion qui semblait intarissable, Marcel emmena madame Thierry chez lui pour qu’elle prît un peu de repos, et confia madame d’Estrelle à Camille, qui se chargea d’imposer silence aux domestiques sur cette visite nocturne, Julien s’était déjà évadé par le pavillon. Julie dormit comme elle n’avait pas dormi depuis longtemps.

Heureusement, M. Antoine, comme nous l’avons dit, ne faisait plus surveiller l’hôtel d’Estrelle, et, heureusement, les domestiques furent dévoués et discrets ; car, s’il eût eu connaissance de l’entrevue, il eût pu se raviser et se fâcher dangereusement. Il avait signifié vouloir informer lui-même madame d’Estrelle de son pardon ; mais il était fatigué, lui aussi, dé-