Page:Sand - Cadio.djvu/124

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— Et tu l’as manqué, imbécile ?

— Il avait les deux mains embarrassées. Il tenait deux recrues qu’il étranglait. Il a pris le canon de mon fusil avec ses dents…

— Et il a avalé les balles ? En voilà des bourdes que je n’avale pas, moi !

LE GARÇON COIFFEUR, attendri. Citoyens, pas de rivalité…

— Oh ! en voilà un qui m’ennuie : il dit toujours la même chose.

— Il est soûl comme un Polonais !

— Où diable ce mâtin-là a-t-il trouvé de quoi se soûler ? Je n’ai pas pu mettre la main sur un verre de cidre !

— Et moi donc ! je n’ai même pas pu trouver le verre. J’ai bu à la fontaine comme un veau.

— Savez-vous que Perrichon est tué, dans tout ça ?

— Quel Perrichon ? le bègue ?

— Non, le tanneur, celui qui demeurait aux Viviers.

— Tant pis ! c’était un bon ; il laisse une femme et quatre enfants !

— Damnés brigands ! j’en veux tuer cinq à la première affaire !

— Qu’est-ce qui crie comme ça ?

— Des blessés qu’on ampute ; ils n’ont pas l’habitude.

— Tiens ! voilà Duchêne avec des vivres.

— Un chaudron de pommes de terre qu’on allait donner aux cochons : qui en veut ?

— Tout le monde ! on est mort de faim !

UN BOURGEOIS DE LA VILLE, apportant un grand panier.